L’Internet à deux vitesses ce n’est pas une rumeur. Le risque est grand que les plus riches bénéficient d’une bande passante plus importante que ceux qui, aux yeux de certains fournisseurs d’accès, ne sont pas rentables pour l’industrie du Net. Le « ‘go slow’ day » de ce 10 septembre vient rappeler l’urgence d’une mobilisation mondiale.
A partir d’aujourd’hui, la neutralité d’Internet est sur le devant de la scène aux Etats-Unis. En effet, plusieurs entreprises américaines activant dans le web dont Etsy, Foursquare, Kickstarter, Reddit et d’autres ont proposé la journée ce mercredi 10 septembre comme jour d’Internet lent («go slow» day) pour protester contre une proposition de l’agence fédérale des télécommunications FCC (Federal Communications Commission, équivalente à l’ARPT en Algérie) consistant à revoir le mode de la tarifications des accès aux sites web par rapport à la rapidité du débit. En clair, il faut payer certains sites plus chers pour un débit plus rapide. Selon les initiateurs de la protestation du « go slow » day, la neutralité du Net est menacée dans la mesure où l’accès rapide pour la totalité des internautes n’est pas garanti. Cette démarche fait suite aux récentes évolutions du débat sur le projet concernant la régulation du trafic web qui a été lancé il y a quelques mois déjà. De nombreux acteurs s’opposent à la cette réforme et militent pour la préservation d’un Internet ouvert afin de favoriser le développement des usages et la liberté d’expression et de communication.
En effet, face à l’émergence de réseaux de télécommunications mobiles et ultra rapides, dotés de capacités de haut niveau, comparables aux réseaux téléphoniques traditionnels, les opérateurs veulent en profiter au maximum. Ils veulent limiter l’accès en lançant des offres différenciées en termes de débits et de contenus et en donnant une priorité d’accès aux personnes souscrivant aux offres les plus chères. Ce qui ressemble à une véritable discrimination dans l’accès à l’information.
Pour rappel, le principe de la « Net Neutrality » consiste à offrir aux usagers un accès égal à Internet sans distinction de contenu ou d’origine. À l’inverse, censurer du contenu comme le font certains opérateurs ou limiter l’accès streaming d’un concurrent pour favoriser ses propres services nuit au principe de cette neutralité. La gouvernance d’Internet se trouve ainsi coincée entre d’une part la nécessité de donner la liberté aux utilisateurs et de garantir l’égalité de traitement de tous les flux de données sur le Net, excluant toute discrimination à l’égard de la source, de la destination ou du contenu transmis, et d’autre part l’obligation de réguler et de vérifier les contenus et l’engagement des gouvernements à faire profiter les internautes des évolutions technologiques du réseau mondial.
Avantage à ceux qui payent cher
Si cette démarche du FCC se concrétise, elle ouvrira la voie à un Internet à deux vitesses et, surtout, à une classification des internautes en deux groupes. Ceux qui bénéficieront d’un haut débit illimité pour regarder les chaînes de télévision en mode streaming et télécharger les métadonnées multimédia. Et ceux, du second collège, qui se contenteront d’un accès plus lent et limité en data. Cependant, beaucoup de providers des services Internet revendiquent le droit d’utiliser le mode de la tarification à l’usage comme moyen de ralentir le trafic des sites web et des applications mobiles qui consommeraient beaucoup de bande passante. Pour eux, si cette situation perdure, Internet sera de plus en plus saturé et la qualité des services offerts sera diminuée par les effets de l’engorgement, notamment avec la croissance du trafic vidéo.
Par ailleurs, la consommation électrique des réseaux, terminaux, et serveurs, astreint les industriels à concevoir de nouveaux matériels plus économes en énergie. Ainsi, dans le cadre de la mise en place d’un Internet 2, de nombreux projets sont en cours de réalisation afin d’améliorer l’architecture et l’offre de service d’Internet, notamment sur le plan de la sécurité, du respect de la vie privée, de la qualité de service de bout en bout, de la résistance aux attaques conduisant à des dénis de service (DDoS), de la mobilité, de la fiabilité, de l’adressage et de l’identification. Pour la plupart des observateurs, le projet de l’Internet 2 qui a reçu l’agrément de principe des industriels de la sécurité, ainsi que des grands acteurs commerciaux, tels que PayPal, est considéré comme un compromis entre les acteurs de l’Internet et les exploitants de réseau. C’est, d’ailleurs, l’unique justification d’un Internet 2. Un réseau privilégié à haute sécurité pour le secteur bancaire et autres secteurs sensibles.