L’ancien délégué général de l’ABEF, Abderrahmane Benkhalfa, plaide pour une nouvelle génération de réformes économiques. Il appelle à des révisions « courageuses » qui donneront des résultats à terme.
Abderrahmane Benkhalfa a plaidé, dimanche, pour une deuxième génération de réformes financières durant le prochain quinquennat. L’ancien délégué général de l’ABEF (association des banques et établissements financiers) a estimé, au cours d’une émission de radio, que cela passe par des mesures « courageuses », comme la dévaluation du dinar et l’élimination de la dualité de l’économie algérienne.
Le prochain quinquennat doit se préoccuper plus de « la consistance de l’économie, pas uniquement de la gestion administrative du chômage », a-t-il dit. Les gestionnaires du secteur public doivent avoir « des comportements d’acteurs de marchés, pas de fonctionnaires ».
La réforme de l’économie doit comprendre plusieurs volets, dont « la vérité des prix et des salaires, la parité du dinar et des taux d’intérêt ». Ce sont là des « mesures courageuses, qui peuvent faire mal aujourd’hui, mais apporter des profits demain ». Les objectifs à atteindre sont au nombre de quatre : lutter contre l’économie informelle, rétablir la crédibilité du dinar, revoir complètement la gouvernance de l’économie par l’Etat, et transformer le secteur bancaire pour qu’il devienne dynamique et innovant.
Saut qualitatif
Il propose aussi une série d’autres mesures, pour gérer l’économie publique avec « les méthodes du privé », stabiliser les règles pour dix ans, et établir une législation préférentielle au profit de la diaspora. Cela permettrait d’effectuer un « saut qualitatif » pour faire de la prochaine législature celle du développement d’une économie « efficiente et transparente ».
Cette deuxième vague de réformes doit, selon M. Benkhalfa, amener à « revoir la gouvernance des banques publiques », en vue de développer la monétique, d’éliminer le paiement cash et de favoriser l’intermédiation bancaire. Pour lui, le secteur bancaire algérien est « solide, mais commercialement faible ». La première phase de la réforme a « bien marché », a-t-il dit. Cependant, le système de compensation mis en place ne fonctionne qu’à dix pour cent de ses capacités, car le cash reste trop étendu.
Il a déploré que la monétique soit limitée aux opérations de retrait, alors qu’il faut développer la monétique de paiement et le paiement à distance. Seuls 3.000 à 4.000 appareils de paiement sont disponibles dans les commerces, a-t-il indiqué, ce qui reflète une faiblesse du secteur. Une autre lacune est révélée par la bancarisation de l’économie, avec la présence d’une agence bancaire pour 25.000 habitants, contre 5 à 10.000 dans les pays voisins.
Pousser l’informel vers la transparence
M. Benkhalfa a déploré le report de l’obligation d’utiliser le chèque. Il a proposé des mesures immédiates, comme le paiement obligatoire par chèque des transactions dans l’immobilier et l’automobile. Il a aussi regretté que les banques elles-mêmes gardent le silence concernant l’utilisation insuffisante du chèque.
Dans le même temps, M. Benkhalfa plaide pour des mesures en vue de permettre au secteur informel de franchir le pas pour passer à la transparence. Il reconnait que ce secteur est à l’origine d’une importante évasion fiscale, qu’il dégrade les pratiques commerciales, mais il y a aussi la bureaucratie et les lourdeurs administratives qui le dissuadent de passer au formel. Il appelle donc à lutter contre l’informel avec les « moyens légaux et économiques », avec notamment des mesures fiscales et règlementaires.
M. Benkhalfa regrette aussi que l’économie algérienne soit coupée en deux. « Il y a une dualité économique, une dualité monétaire, une dualité des pratiques commerciales », relève-t-il. Dans le domaine des salaires, il note la présence de trois marchés de rémunération, l’international, le privé et le public.
Ces distorsions provoquent, selon lui, de graves déséquilibres qu’il faut corriger. « L’acte d’importer ne doit pas être plus rentable que l’acte industriel », dit-il. Il souligne aussi qu’il « ne faut pas forcer la dose sociale au détriment de l’économie »