Au moins huit ONG marocaines de défense des droits humains et de la société civile, ainsi qu’Amnesty International et ATTAC-Maroc, ont décidé de boycotter la seconde édiction du Forum Mondial des Droits de l’Homme, organisé du 27 au 30 novembre à Marrakech.
Ouvert en grandes pompes jeudi dans la ville-vitrine du tourisme marocain, le deuxième FMDH-2014 est suivi par quelque 6.000 participants issus d’une centaine de pays, représentant d’ONG marocaines et internationales, des agences des Nations Unies, et des acteurs politiques et associatifs. Plusieurs thèmes se rapportant aux droits de l’homme, à l’enfant et à la femme, ainsi que contre la torture font partie de l’agenda de ce forum. Pour autant, la plupart des ONG marocaines de défenses des droits de l’homme, ou contre la torture, le mouvement du 20 février et les deux ONG internationales ATTAC et Amnesty ont dénoncé les conditions de la tenue de ce forum, qu’elles ont décidé de boycotter.
Dans un communiqué publié à Londres à la veille de ce FMDH-2014, Amnesty International a dénoncé »les restrictions sur ses activités » au Maroc, au moment »où ce pays abrite le FMDH ». Amnesty ajoute que »pour la première fois depuis 1993, les autorités marocaines ont essayé, ces derniers mois, de limiter les activités d’AI en faveur des droits humains dans le pays ». AI ajoute que ‘’ces restrictions, qui concernent le nombre de groupes de défense des droits humains dans leur pays jettent une ombre sur le Forum mondial des droits de l’homme ».
La Protesta des ONG à Marrakech
A Marrakech, les défenseurs des droits de l’homme se sont donné rendez vous à la place de Bab Ejdid, en plein centre de la médina, pour protester contre la tenue de ce Forum. L’association marocaine de défense des droits humains (AMDH) est l’une des huit ONG marocaines a voir décidé de boycotter ce forum. Dans une motion rendue publique le 15 novembre dernier, l’AMDH a indiqué que »le Bureau central (de l’Association Marocaine des Droits Humains) décide de boycotter tous les travaux du Forum mondial des droits de l’homme ». Motif: l’organisation a constaté »le refus de l’Etat d’assainir le climat politique avant la tenue du Forum », et, »pis encore, a enregistré la poursuite de l’agression à l’encontre des défenseurs des droits humains ».
Amnesty dénonce par ailleurs la poursuite de militants des droits de l’homme par la justice marocaine, et leur maintien en détention, citant le cas de la militante du Mouvement du 20 Février Wafa Charef, qui avait écopé au mois d’octobre dernier de deux ans de prison en appel.
Le « clinquant » du FMDH, le « désert » des droits de l’homme
Refusant le »clinquant » d’un Forum organisé par l’Etat marocain avec des organisations qu’il a créées et soutenu financièrement, les ONG qui ont boycotté ce FMDH-2014 ne sont pas restées inactives, et organisent chaque jour depuis le début du Forum des manifestations place Bab Ejdid. Pour Hamza Ait Ouhemou, secrétaire général de la section de Marrakech d’ATTAC, également membre d’un collectif rassemblant de nombreuses associations de la société civile marrakchie venues dénoncer l’organisation du FMDH dans leur ville, estime, dans des déclarations au site de l’AMDH, que »les slogans promus par les organisateurs de cet événement n’ont rien à voir avec la réalité quotidienne des marocains car leurs droits politiques, culturels et socio-économiques sont bafoués dans un pays qui prétend organiser un événement d’une telle ampleur ».
Pour l’humouriste Bziz, »les autorités ont mobilisé tous les moyens pour ce forum. L’objectif étant de faire croire au monde que le dossier des droits humains au Maroc est définitivement réglé ». Meryam Demnati, militante à l’Observatoire amazigh des droits et libertés (OADL) s’est dit »offusquée » de la tenue du FMDH au Maroc, car pour elle »il ne peut y avoir de FMDH dans un pays de non-droit ». Enfin, Abdelhamid Amine, militant de l’AMDH et responsable syndical, souligne que »les droits syndicaux et les droits des travailleurs ne sont pas respectés au Maroc ». A l’ouverture du Forum, les militants associatifs marocains avaient brandi une banderole sur laquelle étaient écris: »les ONG dénoncent la régression des libertés et des droits humains au Maroc ».