Créée en 1999, à Blida, la société privée LeaderSoft a accumulé une grande expérience dans l’édition de logiciels de gestion. Pour son PDG, Bachir Tadjeddine, ingénieur en systèmes informatique, il faut tout un écosystème pour développer cette industrie en Algérie.
Pouvez-vous nous donner un bref aperçu de Leader Soft, de sa naissance, de sa composante humaine, et de ses domaines de spécialisation ?
La société LeaderSoft est née en 1999. Nous étions trois ingénieurs issus de l’Institut supérieur d’informatique de Oued Smar. L’équipe de développement des logiciels est composée de 13 ingénieurs actuellement. Nous avons fait notre chemin. Nous comptons comme clients des centaines d’entités, parmi les administrations et les entreprises, qui font confiance dans nos logiciels.
Comment a évolué votre portefeuille clients ?
Nous avons plus de 2000 entités dans notre portefeuille clients dont plus de 80% sont des entreprises. Au début c’était difficile de vendre un logiciel, surtout dans les années 1990, où l’informatique était à ses débuts en Algérie. Un ordinateur coutait à l’époque 150.000 DA, c’était un énorme investissement. Le client algérien acceptait difficilement de mettre, en plus, de l’argent pour un produit immatériel (logiciel) qu’il ne pouvait pas toucher. Nous avons tenu le coup et nous avons persévéré dans l’argumentation pour convaincre les utilisateurs de l’avantage d’informatiser et d’automatiser leur gestion.
Vous travaillez avec quelles administrations ?
Nous travaillons avec les hôpitaux, les APC, et autres administrations publiques. Nous avons des produits adaptés tels que « Rateb » le logiciel de paye de la fonction publique, et « Baridi » pour la gestion du courrier arrivé-départ. Nous avons aussi une très belle expérience avec le Centre National de l’Insémination Artificielle et de l’Amélioration Génétique (CNIAAG), avec qui nous avons créé un système innovant de suivi des inséminations artificielles de notre cheptel bovin sur tout le territoire national.
Combien coutent vos logiciels ? Quel est le coût de conception d’une application ?
Le prix d’un logiciel commence à partir de 50.000 DA. Le coût de conception d’une application ne peut pas être en dessous de 2.500.000 DA.
Qu’est ce qui est compris dans la partie service après-vente (SAV) ou Support que vous assurez à vos clients ?
Le SAV à LeaderSoft comprend : l’assistance téléphonique, la télé-intervention, l’accès au centre de support « Selekni » où chaque demande de support se voit assigner un numéro de ticket unique qui permettra au client de suivre la résolution du problème par nos équipes, et d’accéder à un historique complet de toutes les demandes de support du client. La plateforme de tickets comprend aussi un FAQ. Dans le SAV il y a aussi un accès à l’espace client pour les mises à jour des logiciels.
Trouvez-vous les ressources humaines nécessaires ? Avez vous des liens avec les Universités pour former à profils spécifiques à vos besoins ?
Les ressources humaines sont disponibles en Algérie. Mais nous formons nos nouveaux développeurs sur les Framework que nous utilisons le développement de nos logiciels.
Il est beaucoup question de sécurité informatique ces derniers temps. Vos logiciels sont-ils sécurisés ?
Il y a deux aspects de la sécurité des logiciels. Le premier c’est la protection contre la copie illégale. Nos logiciels sont protégés par une activation en ligne et une clé dongle. Mais aucune protection n’est infaillible. Le second aspect concerne la protection des données de l’utilisateur. Cette tâche relève exclusivement du ressort de l’administrateur des données du client.
Windows 10 suscite des craintes sur la confidentialité des données des utilisateurs. Vous éditez un logiciel propriétaire. Quelles assurances donnez vous à vos clients sur la protection de leurs données ?
A partir du moment où votre PC est connecté à internet, il y a toujours un risque que vos données soient détournées pour se retrouver en possession de personnes malintentionnées. A LeaderSoft, nous commercialisons des logiciels de gestion, la sécurité des données n’est pas de notre ressort. Il y a des logiciels de sécurité qui s’occupent de protéger les données.
Mais, entre nous, à l’ère du tout connecté, big brother est partout, Internet, téléphones mobiles… Si aujourd’hui il y a un grand bruit concernant Windows 10, qui vous dit que Windows 8, 7, Vista ou XP ne s’appropriaient pas nos données ? Regardez aussi du côté des applications mobiles. Lorsque vous installez une application sur votre smartphone, elle vous demande l’accès à votre microphone, caméra, positionnement… Vous pensez que c’est innocent ?
Pensez-vous que les logiciels open source sont une solution ?
Les systèmes open source désignent des logiciels dans lequel le code source est à la disposition du grand public. Mais qui nous garantit qu’ils ne nous espionnent pas. Le fait que vous ayez le code source ne vous permet pas d’affirmer qu’il n’y a pas d’espionnage. Les sources d’un système d’exploitation, c’est des millions de codes, même les plus informaticiens les plus chevronnés trouveront du mal a en déceler les fragments de codes espion. Lorsque vous êtes derrières votre PC, quelque soit le système que vous utilisez, il vous suffit de consulter un site internet, de vous connecter à un utilitaire de discussion, ou d’installer un module d’un logiciel open source et le risque que vous soyez espionné est là. J’admets quand même qu’un système open source est plus maitrisable qu’un système propriétaire.
L’édition Software en Algérie n’est pas très développée. Quelles sont les raisons d’après vous ?
Le software ou le développement de logiciel est une industrie maitrisable de bout en bout, ce n’est pas une technologie dont seul l’occident possède les secrets. Développer un logiciel ce n’est pas construire un avion. L’Inde exporte en milliard de dollars en logiciels. Nos ingénieurs informaticiens sont des génies, mais il faut tout un écosystème pour que cette industrie se développe en Algérie. Le premier qui doit s’engager c’est l’État, car il y a des investissements à faire que seul les autorités en sont capables. Ne recréons pas la roue, il faut juste copier l’expérience de l’Inde et l’adapter.
Nous avons un avantage sur les indiens. Nos informaticiens maîtrisent le français et l’anglais. Nous sommes près de l’Europe, du coup notre marché est plus important pour l’offshoring software. L’Inde au départ a créé l’ESC (Electronics & Computer Software Export Promotion Council), un organisme directement rattaché au Premier ministère dont l’objectif initial était d’atteindre l’exportation de 60 millions de dollars en software. Aujourd’hui ils sont à plus d’un milliard de dollars US. Nous avons toujours demandé aux pouvoirs publics de créer un haut-commissariat aux TIC, doté d’un budget conséquent et d’objectifs quantifiables, qui prendra en charge l’accompagnement des sociétés technologiques (logiciels et autres) existantes pour les aider à exporter.