Suite aux accusations injurieuses de Abdelmadjid Tebboune à l’égard de Ihsane El Kadi, directeur de Radio M et Maghreb émergent, le collectif international de défense du journaliste a réagi à travers un communiqué dont nous publions l’intégralité ci-après. Cette réaction intervient à la veille de la tenue de son procès fixé pour le 12 mars prochain.
Le président Abdelmadjid Tebboune doit cesser ses atteintes à l’indépendance de l’autorité judiciaire et à la présomption d’innocence d’Ihsane El Kadi
Dans une allusion à peine voilée à Ihsane ElKadi, lors d’un entretien accordé à la presse algérienne, diffusé le 24 févriers 2023, le président Abdelmadjid Tebboune l’a qualifié de « khabardji » (collaborateur, informateur), l’accusant ainsi de « collusion avec des forces étrangères ».
Il a également justifié la fermeture de Radio M et de Maghreb Émergent, dont notre mandant est directeur, par le fait qu’il s’agissait de « médias illégaux ».
En réponse à une question sur ce qui retient les autorités de ne plus imprimer les journaux endettés envers les imprimeries publiques, le président Abdelmadjid Tebboune a, en effet, déclaré : « Mais voyez-vous […], nous avons fermé quelque chose d’illégal appartenant à un khabardji, et cela a provoqué des réunions d’avocats je ne sais où. L’Algérie est ciblée […]. ».
Outre que ces déclarations portent atteinte à l’indépendance de la justice et à la présomption d’innocence d’Ihsane El Kadi, le chef de l’État algérien a ainsi admis sa responsabilité dans l’arrestation d’Ihsane El Kadi, en détention provisoire depuis le 29 décembre 2022, aussi bien que dans la mise sous scellés de Radio M et Maghreb Émergent.
Le Collectif international des avocats d’Ihsane El Kadi :
– s’élève contre cette atteinte au principe de la présomption d’innocence et considère qu’elle constitue, dans la perspective du procès d’Ihsane El Kadi, une tentative d’influencer la justice ;
– appelle à l’arrêt des campagnes de dénigrement contre Ihsane El Kadi, ainsi que contre les médias édités par la société Interface Médias, leurs dirigeants et leurs employés ; ces campagnes, dans le climat tendu actuel, peuvent être considérées comme autant de menaces contre l’intégrité physique des personnes prises pour cible ;
– réitère son appel à la libération immédiate d’Ihsane El Kadi, la détention provisoire n’étant en aucune manière justifiée dans son cas ;
– rappelle qu’Ihsane El Kadi doit bénéficier de toutes les garanties d’un procès équitable telles que prévues dans la législation algérienne ;
– invite toutes les organisations nationales et internationales des droits humains à soutenir la demande de libération d’Ihsane El Kadi et de toutes les victimes de la répression.
Tunis, Rabat, Nouakchott, Bruxelles et Paris, le 3 mars 2023.
Le Collectif international des avocats d’Ihsane El Kadi :
[TUNISIE] Saïda Ben Garrach, avocate au barreau de Tunisie et ancienne conseillère aux droits de l’Homme à la présidence de la république ; Ayachi Hammami, avocat au barreau de Tunisie et ancien ministre des droits de l’Homme ; Abdennaceur Aouini, avocat au barreau de Tunisie et défenseur des droits de l’Homme ;
[MAROC] Souad Brahma, avocate au barreau de Settat, défenseure de plusieurs détenus d’opinion et du Hirak du Rif ; Abderrahim Jamaï, avocat au barreau de Rabat, ancien bâtonnier, membre du collectif d’avocats en défense des détenus du Hirak du Rif ; Mohamed Sadkou, avocat au barreau de Rabat et défenseur de détenus d’opinion, d’activistes de mouvements sociaux et des journalistes Omar Radi et Soulaimane Raissouni, ainsi que de l’historien Maati Monjib ;
[MAURITANIE] Fatimata M’Baye, avocate au barreau de Mauritanie et présidente de l’Association mauritanienne des droits de l’Homme ; Youssouf Thierno Niane, avocat au barreau de Mauritanie et représentant de l’Association mauritanienne des droits de l’Homme à Nouadhibou ;
[BELGIQUE] Alexis Deswaef, avocat au barreau de Bruxelles, vice-président de la Fédération internationale pour les droits humains et président d’honneur de la Ligue des droits humains ;
[FRANCE] Raphaël Kempf, avocat au barreau de Paris ; Pierre Brunisso, avocat au barreau de Paris, membre de la Ligue des droits de l’Homme ; Mohamed Jaite, avocat au barreau de Paris, membre de l’Association marocaine des droits humains.
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