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Algérie

Crédit à la consommation: Eviter les solutions utopiques, et agir sur l’offre (Contribution)

Par Mohamed Boukhalfa
janvier 4, 2016
Crédit à la consommation: Eviter les solutions utopiques, et agir sur l’offre (Contribution)

 

 

La campagne lancée à la fois  sous l’intitulé « consommons algérien » et le retour au crédit à la consommation ne pourra qu’avoir un impact limité sur l’économie du pays sans réformes structurelles.

 

 

 

1.-Il faut différencier les recettes de politiques économiques appliquées dans un pays  développés et  dans un pays en voie de développement qui peuvent avoir des effets pervers. Car l’Algérie est une économie rentière.  Le modèle keynésien de relance de la production par la consommation, qui part de l’hypothèse de l’existence d’une offre sous-utilisée (n’est) pas transposable à l’Algérie qui souffre d’absence de facteurs de production compétitifs en termes de coût/qualité, et non pas d’oisiveté » de la part des consommateurs. Les importations de biens intermédiaires sont passées de 17,423 milliards de dollars en 2012, à 17,536 en 2013, à 17,475 milliards de dollars en 2014. Par ailleurs, en  Algérie,  existe un lien entre la logique rentière et la sphère informelle à dominance marchande qui contrôle 40% de la masse monétaire en circulation et 65% des segments des produits de première nécessité. Les exportations d’hydrocarbures avec les dérivées  représentant  97/98% permettant d’assurer l’importation de 70% des besoins des ménages et des entreprises qu’elles soient publiques ou privées dont le taux d’intégration ne dépasse pas 15%.   La superficie économique est représentée par 83% de petits commerces-services, le secteur industriel (représentant) moins de 5% du produit intérieur brut (PIB) et   plus de 95% sont des PME-PMI peu initiées au management stratégique, et selon une enquête récente, plus de  90% sont des unités individuelles ou Sarl n’utilisant pas les nouvelles technologies.  

Eviter l’illusion monétaire

 

Aussi, j’attire l’attention du gouvernement d’éviter l’illusion monétaire, le capital-argent n’étant qu’un moyen et  d’appliquer avec précaution cette mesure, car cet octroi de crédits à la consommation peut entraîner l’accroissement des importations de matières premières et créer des tensions au niveau de la balance des paiements. Il  est important de procéder par étape, en commençant par assurer le crédit à la consommation sur des produits avec un taux d’intégration d’au moins 15%, mais en imposant aux producteurs de faire augmenter ce taux suivant des délais bien définis, l’objectif final étant de parvenir à un taux d’intégration progressif  se situant entre 40 et 50%.  Car  la question essentielle qui se pose  aujourd’hui est celle de  la transition vers une économie hors rente assortie d’une transition énergétique du fait de la faiblesse de la croissance moyenne inférieure à 3% entre 2000/2015 malgré une dépense publique sans précédent depuis l’indépendance politique. L’Algérie ne peut continuer au rythme actuel de dépenses.  L’on doit impérativement lever toutes les contraintes entravant l’environnement des affaires,  la bureaucratie sclérosante,   d’opérer une  refonte du système financier, du système socioéducatif et du système du foncier en encourageant l’économie de la connaissance et l’entreprise créatrice de richesses publiques ou privées locales ou internationales.

 

Quel rôle pour la centrale des risques

2.- Sur le plan technique, le retour du crédit à la consommation dépend du bon fonctionnement de la centrale des risques.  On sait que dans la loi de finances 2015, le gouvernement  autorise les banques à accorder, en sus des crédits immobiliers, des crédits à la consommation destinés à l’acquisition de biens par les ménages. Le gouverneur de la Banque d’Algérie a annoncé, le17 août 2014 que le retour au crédit à la consommation, qui avait été suspendu en 2009, sera accompagné par l’entrée en service de la centrale des risques qui était  prévue dès le deuxième semestre de 2015. À propos du rôle de la centrale des risques, elle fournira des éclairages aux banques et permettra de connaître le stock des crédits de chaque client qui aura un numéro bancaire unique. Elle permettra également l’élaboration d’une liste noire qui regroupera les clients qui ont un endettement excessif et seront interdits à nouveau de prêt du fait qu’ils auront dépassé un certain seuil. La saisie des biens hypothéqués, qui est un élément normal dans la gestion des crédits, est le dernier recours pour recouvrer les crédits accordés, a rassuré le responsable, selon qui les banques algériennes ont recourt à cette solution avec beaucoup de prudence. Mais peut-on imposer cette mesure aux banques privées qui sont libres de leur gestion et à toutes les banques publiques  au risque de les mettre en faillite ?  Le crédit à la consommation  renvoie au débat sur le pouvoir d’achat des Algériens afin d’éviter les non recouvrement,  car il faudra  rembourser le principal plus les intérêts. Face à la détérioration du pouvoir d’achat, ne risque-t-on pas d’amplifier l’emprise du crédit informel, ce qui n’est pas propre à l’Algérie ? La suppression du crédit à la consommation est-elle la solution adéquate pour contenir les importations ? L’amélioration du pouvoir d’achat des Algériens ne passe t-il pas  inéluctablement par un retour à une croissance réelle hors hydrocarbures ? Or le taux d’inflation officiel  déjà élevé du fait notamment du dérapage du dinar et de la faiblesse de la production et de la productivité est  compressé artificiellement par les subventions sans lesquelles il approcherait les 10%. Aussi, un débat national sur les subventions généralisées, non ciblées devient urgent. Il y a lieu de prévoir leur budgétisation par le parlement avec une affectation précise et datée par une chambre de compensation aux secteurs inducteurs et les catégories les plus vulnérables afin d’éviter le gaspillage et les fuites hors des frontières. 

Une question entropique

 

En réalité, le crédit à la consommation  renvoie à l’entropie qui caractérise la gouvernance algérienne et la panne dans la réforme globale qui dépasse le cadre strictement économique. L’Algérie doit impérativement engager des réformes microéconomiques et institutionnelles  pour éviter le scénario de l’impact de la crise de 1986. Ceci exige une gouvernance rénovée tant centrale que locale et la valorisation du savoir, en levant toutes les contraintes d’environnement. L’objectif stratégique pour l’Algérie est de  réhabiliter l’entreprise créatrice de richesses et son fondement le savoir pour s’adapter tant à la mondialisation de l’économie dont l’espace  africain  et méditerranéen est son espace naturel qu’aux mutations internes.

 

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