Mouloud Hamrouche a confirmé, jeudi, qu’il n’est pas candidat à l’élection présidentielle du 17 avril. Discours de raison adressé à l’appareil militaire et sécuritaire, mais déception pour ceux qui voulaient en découdre tout de suite avec le quatrième mandat.
Mouloud Hamrouche a de la peine à convaincre. Sa déclaration du 17 février a créé un enthousiasme inattendu, mais sa conférence de presse de jeudi 27 février a débouché sur un nouveau malentendu. Une incompréhension qui résulte d’un fossé énorme entre un homme qui ne croit pas à l’élection du 17 avril prochain, et qui refuse un coup de force ; et, de l’autre côté, une opinion, assommée par le quatrième mandat auquel est promis le président Abdelaziz Bouteflika, et qui a vu en Mouloud Hamrouche un candidat susceptible de contrer le chef de l’Etat lors de ce scrutin.
Les propos de Mouloud Hamrouche sont pourtant tranchés. Ils ne laissent place à aucune ambiguïté. « Seuls les pays démocratiques et les États de droit garantissent une stabilité profonde », dit-il. « Leurs armées ont triomphé et gagné toutes les guerres durant le dernier siècle ». Après cette profession de foi, il affirme qu’en Algérie, il n’est pas possible d’aller à un régime démocratique sans l’armée, encore moins contre l’armée. « La neutralité de l’armée ne suffit pas, il faut son adhésion », dit-il. Ce qui signifie clairement qu’il ne croit pas à une victoire électorale contre la volonté de l’armée, et que même si cela était possible, cela peut se révéler dangereux, comme l’a montré l’expérience égyptienne. Mais dans le même temps, il ne souhaite pas « un coup d’Etat ».
Nouvelles générations
Comment, dans ces conditions, aller construire un système démocratique ? Mouloud Hamrouche exprime l’espoir que l’Algérie aille vers un « nouveau consensus national », bâti sur de nouvelles règles, que sont l’Etat de droit et la démocratie. Pour lui, cette tâche doit être menée par les « nouvelles générations et élites », auxquelles il s’associe, tout en les invitant à ne pas « s’encombrer des fardeaux, des errements et des querelles du passé ». Hamrouche lance aussi des avertissements. « Les facteurs de blocage sont toujours là, avec ou sans renouvellement de mandat (du président Bouteflika). Ces blocages sont des risques sérieux. Ce sont des impasses qui recèlent de graves menaces, exacerbent les facteurs de division, paralysent les institutions et soumettent les hommes à des pressions impossibles », dit-il. Il ne veut pas que les responsables des « forces de défense, de sécurité, les cadres et acteurs économiques restent soumis, à chaque échéance présidentielle et à chaque changement de responsables, à d’intolérables pressions, interrogations et examens de conscience ». Il déplore que les hauts responsables soient contraints d’affirmer leur « allégeance » aux dirigeants du moment, au lieu « d’appliquer des programmes élaborés et défendus par des courants politiques organisés en partis ».
Décalage
Mais ce discours passe mal. Pour une partie de l’opinion, qui veut en découdre tout de suite, Hamrouche ne s’engage pas assez. Il évite l’affrontement. Alors que lui prône la raison, en déclarant que « l’édification d’un régime démocratique et l’instauration d’un État de droit sont des approches raisonnables qui mettront à l’abri la cohésion, la discipline et l’adhésion de tous les constituants de notre société », des activistes impatients, choqués par l’idée du quatrième mandat, ne comprennent pas ce discours, trop prudent à leurs yeux. Et Hamrouche a beau dire qu’il « demande pardon à celles et à ceux qui ont cru comprendre » que sa précédente déclaration était un « acte de candidature », cela ne calme pas les impatiences. Visiblement, le choc provoqué par le quatrième mandat était trop fort, l’attente était trop élevée, et Hamrouche, qui refuse d’aller à l’aventure, n’est pas en mesure de répondre à une vague de colère dont il n’a probablement pas mesuré l’ampleur.
Partie 1: la déclaration complète
Partie 2 : Réponses aux Questions des journalistes