La ministre des nouvelles technologies de la communication et de l’économie numérique a opéré un virage à 180 degrés à propos du m-paiement, dont elle était jusque-là une partisane déclarée.
Mme Imène Houda Feraoun change de cap et accable le m-paiement. Alors qu’elle laissait entendre, il y a à peine un an, que le paiement par mobile pourrait constituer une alternative au e-paiement qui peine à se développer, la ministre des Technologies de l’information, de la communication et de l’économie numérique a fait un virage à 180 degrés sur la question, évoquant pêle-mêle le danger de l’informel et une menace contre l’économie nationale.
Selon Mme Feraoun, qui s’exprimait lors de l’émission « L’invité de la rédaction» de Souhila Hachemi, sur la chaine 3 de la radio, ce modèle, qui vise à « permettre aux opérateurs (de téléphonie mobile) de presque se transformer en banques pour échanger de la monnaie virtuelle », a « déjà démontré que c’est la faillite des systèmes financiers ».
A partir de la minute 25 :25
Affirmant que « le marché parallèle a épuisé notre économie », Mme Feraoun a estimé que « si on crée un autre marché informel virtuel, ça va être terrible ». « On ne souhaite pas créer un marché parallèle virtuel, ça va jeter un nouveau coup de froid sur notre économie », a-t-elle ajouté.
Un impact « terrible »
Mme Feraoun s’est acharné contre le m-paiement, le présentant comme une menace dont l’impact serait « terrible », et comme un système destiné à faciliter le « blanchiment d’argent ». Critiquant « le paiement anarchique qui s’est développé dans certains pays », elle a affirmé que l’Algérie « ne va pas mettre les consommateurs sur un modèle de paiement qui va ruiner l’économie nationale ».
S’exprimant sur un ton très ferme, mettant en avant le côté sécuritaire, elle a ajouté : « on ne peut pas tolérer que les gens s’habituent à transformer leur argent en monnaie virtuelle alors qu’on n’a pas les moyens de sécuriser ». « On ne peut tolérer qu’il y ait des transactions mobiles qui vont proliférer alors qu’on n’a aucun moyen de les tracer », a-t-elle dit.
Selon elle, « les réseaux de blanchiment s’appuient sur tout e qui est transaction financière non traçable ». Entretenant une certaine confusion, elle évoqué les bictoins, que les Etats-Unis et l’Europe ont interdit, pour affirmer qu’il « n’y a personne au monde aujourd’hui qui puisse tracer les échanges financiers en ligne lorsqu’il s’agit d’un opérateur de télécommunications qui permet l’échange de monnaie virtuelle ».
La préférence de Mme Feraoun va vers « un autre modèle », comme le développement d’applications pour le paiement par smartphones. Il s’agit de « portefeuilles dédiés, liés à un service particulier ».
Retour à l’ancien discours
Il y a un an, invitée la même émission, Mme Feraoun tenait un discours totalement différent. Elle affirmait alors que le recours au m-paiement relevait d’une « tendance mondiale » et que cette formule pourrait « remplacer le paiement électronique ». Elle en chantait alors les avantages : c’est une formule qui « ne demande pas d’investissements colossaux », elle représente une « phase technologique plus développée », et l’Algérie, où on compte près de dix fois plus de mobiles que de cartes bancaires, serait un terrain favorable. Elle en tirait alors une conclusion : «au lieu de s’éterniser dans le paiement électronique, il serait temps pour l’Algérie d’apprendre à faire un saut technologique».
Pourquoi ce revirement ?
Un spécialiste des TIC estime que le revirement de Mme Feraoun s’explique par trois facteurs. Il cite le souci qu’elle avait, il y a un an, de trouver une alternative après l’échec du du e-paiement, qui accuse toujours un immense retard.
Il évoque ensuite le risque de voir les banques algériennes, déjà en difficulté, laisser des plumes si de opérateurs de téléphonie mobile, beaucoup plus dynamiques, étaient autorisés à exercer une activité bancaire. Dans le nouveau gouvernement de Mme Abdelmadjid Tebboune, Mme Feraoun a aussi la charge de l’économie numérique.
Enfin, ce spécialiste estime « probable » une intervention des services de sécurité, qui ne s’estiment pas encore aptes à maitriser un domaine très complexe. Le poids des services de sécurité reste prédominant dans ce genre de décisions. Leur aval est indispensable, particulièrement dans le secteur des TIC.