Ceux qui décident en Algérie ne croient pas à l’industrie de la connaissance et au TIC, ils sont restés très début 20ème siècle alors que l’économie est au 21ème siècle avec de nouveaux paradigmes. Un point de vue pamphlétaire de B.Mahdi sur le décalage de l’Algérie avec le reste du monde.
En dehors de l’Algérie et dans le monde réel, les affaires continuent de marcher. C’est ainsi que l’on vient d’apprendre que Facebook a acheté pour la somme faramineuse de 19 milliards de dollars la petite société de la Silicon valley qui édite l’application WathsApp. Qu’une société comptant moins d’effectifs qu’un simple service d’une société nationale algérienne vaille autant d’argent semble bien ahurissant au pays de « l’industrie industrialisante ». Au-delà de l’aspect anecdotique, quels enseignements peut-on tirer pour l’Algérie ?
L’économie du 21eme siècle
Il peut sembler à première vue hallucinant qu’une société qui emploie à peine 50 personnes (tous devenus multimillionnaires aujourd’hui), agents de sécurité, secrétaires et chauffeurs compris vaille ce prix. D’autant plus que cette société non seulement ne fait pas de bénéfices mais pratiquement pas de chiffre d’affaires non plus. A 19 milliards de dollars, cela représente, tout de même, plus que la valeur réunie des sociétés bien établies comme Peugeot, Air France KLM et Alsthom avec leurs centaines de milliers d’employés et leurs dizaines d’usines de par le monde.
Bien entendu pour l’acquéreur Facebook, il s’agit avant tout d’un achat défensif. Eviter une concurrence potentielle d’un service qui même s’il n’a que 3 ans d’âge, est en rapide expansion. Et dans cette course aux millions voire aux milliards d’utilisateurs, c’est le nombre qui fait la différence. Le nouvel or noir est la faramineuse quantité de données amassées sur les utilisateurs et leurs habitudes ; et qui vont constituer une mine d’or pour les publicitaires pour mieux cibler leur clientèle. Il est évident que tout le business modèle de cette nouvelle économie tourne autour de la publicité. Tous les géants de l’internet comme Google ou Facebook ne tirent leur profit que des annonceurs. On peut se poser dès lors la question de la valorisation gigantesque de ces sociétés alors qu’elles génèrent très peu de profits. Le PER (price earning ratio un indice permettant d’apprécier la rentabilité d’une action par rapport à son prix) de Google, la plus profitable est à 35 alors que celui de Facebook est à des valeurs stratosphériques de 120. Pour donner une idée, les industrielles en France sont à environ 8, les financières à 10 et les pépites du luxe à 20. Il n’empêche qu’une société comme Google pèse plus qu’Exxon Mobil, une « major » du pétrole qui était depuis presque des dizaines d’années la première valorisation mondiale depuis la Standard Oil de Rockfeller. La réponse est que les cours d’aujourd’hui traduisent les résultats attendus de demain. Et que cela montre la confiance des investisseurs dans la croissance de la société et anticipent les futurs bénéfices. Par cette valorisation, ils suscitent l’innovation et donnent une puissante motivation à tous les brillants esprits et entrepreneurs voyant par eux-mêmes qu’il est possible de s’enrichir par le travail et surtout par l’imagination.
Une Algérie encore au 20eme siècle
Des informations comme celle-ci semblent ahurissantes pour les décideurs Algériens eux qui ne croient qu’à la ferraille, les hauts fourneaux qui déversent les coulées d’acier en fusion et la bonne mécanique. Ils leurs semble totalement absurde qu’il puisse y avoir des économies basées sur des futilités pareilles. La réclame, la vidéo, les jeux, les applications sur mobiles, les discussions de ménagères sur le mobile etc., cela ne peut pas être très sérieux. On comprend alors mieux le peu d’empressement qu’a montré l’Algérie pour l’introduction du mobile et surtout la 3G… On est pratiquement parmi les derniers pays dans le monde à l’avoir. Et on est parmi les pays qui ont la plus faible pénétration d’internet et une quasi-absence de l’industrie du logiciel. En fait, on ne croit pas dans ce pays à l’industrie de la connaissance ou aux technologies de l’information (IT), à part dans les slogans et les annonces. La raison essentielle est que la décision économique (s’il y’en a une) appartient à une gérontocratie du siècle dernier formatée à l’industrie industrialisante conceptualisée par M Abdesselam Belaid. Du président à ses ministres, et spécialement à qui on a confié les technologies numériques du futur en Algérie, la dernière fois que ses informations ont été mises à jour, Boumediene fumait encore ses cigares. Au lieu d’un jeune cerveau formé à l’étranger plus près des nouveautés sans cesse renouvelées, on a mis un vieillard dont la seule prouesse est d’avoir pondu un cahier de charges pour la 3G dont la complexité devrait être enseignée dans les écoles de management ; et qui semble avoir fait sienne la devise des Allemands : pourquoi faire simple quand on peut faire compliqué ? Toutes les tentatives privées dans les IT ont été systématiquement mises en échec par le ministère des postes et télécommunication et son appendice Algérie Telecom en maintenant un monopole de fait. Font-ils avancer l’informatisation de l’Algérie pour autant ? Disposant d’un encadrement technique d’une médiocrité sans pareille, ils sont incapables de mener à terme le moindre projet. Ils présentent comme une prouesse l’informatisation de l’état civil en… 2014, et ils ne parlent plus du e-gouvernement 2013, seulement d’e-gouvernement. Cela aurait été drôle un e-gouvernement 2013 en 2020 ?
Il ne fait pas se leurrer, la situation n’est pas près de changer. Dans les systèmes politiques fermés et dictatoriaux, l’information et la nouveauté sont les ennemies. Non seulement elles ne servent à rien mais peuvent donner des idées à la « populace ». A la place, on abreuve les gens de slogans. Outre atlantique, on leur dit de travailler, d’inventer et d’innover et vous deviendrez millionnaires ; ici, on leur dit de travailler mais pour le développement de l’économie nationale. Avec WhatsApp, on sait maintenant ce qui marche et ce qui sonne creux. Malheureusement, on est rentré au 21eme siècle avec des hommes du passé qui ne peuvent amener que des solutions du passé…