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L’OPEP si loin d’Oran 2008, si proche de la guerre des parts de marché (opinion)

Par Yacine Temlali
novembre 17, 2014
L’OPEP si loin d’Oran 2008, si proche de la guerre des parts de marché (opinion)

Le retrait de 500.000 barils jours, répartis sur les membres de l’OPEP, ne suffira pas à redresser les cours en 2015. Il faudra plus, une rediscussion à la baisse des quotas. Scenario périlleux pour l’Algérie qui prendra part à la prochaine réunion du cartel, à Vienne le 27 novembre 2014, au pire moment de sa courbe de production.

 

 

A 10 jours de la réunion de l’OPEP de Vienne rien n’est acquis au sujet d’une intervention du cartel pour stopper la baisse des cours du pétrole. La dernière fois que l’OPEP s’est retrouvée devant une situation aussi difficile, c’était à la fin de l’année 2008 à Oran. Les cours du brut s’étaient littéralement écroulés en six mois (plus de 100 dollars de perdus) alors qu’il s’agit, cette fois, d’une baisse de 35 dollars sur quatre mois représentant environ un tiers des cours. Mais à la différence de la conférence historique d’Oran, l’orientation est, cette fois, plus confuse.

En 2008 tous les membres de l’OPEP étaient favorables à une coupe de la production ; l’enjeu de la réunion de l’hôtel Sheraton d’Oran était de savoir de combien il fallait couper. Cette fois, le principe de la réduction de la production n’est même pas acquis dans l’organisation. Principal motif, les projections de marché ne permettent pas de pronostiquer un redressement des cours si l’OPEP retire les 500.000 barils par jour qu’elle met en trop sur le marché. Un excédent rapporté aux 30 millions de barils jours prévus par les quotas de production en vigueur dans l’OPEP. L’arrivée le 17 décembre 2008 à la réunion de l’OPEP d’Oran du vice- Premier ministre russe avait ouvert la porte à un spectaculaire accord de baisse de production (4,2 millions de barils-jour), le plus important de l’histoire de l’organisation. Oran a permis de redresser les cours durant une année 2009 durant laquelle, pourtant, la crise financière mondiale ne faisait que poser ses premières empreintes sur l’activité économique réelle.

Rien donc n’augure d’un tel scenario dans les jours qui viennent. Les stratégies des pays membres sont dissemblables. Les concurrents non OPEP se sont diversifiés et n’ont plus pour seuls noms Russie, Norvège ou Mexique, mais aussi Etats-Unis, Brésil et Guinée Equatoriale. Et surtout, dix années de pétrole cher donnent le sentiment aux pays de l’OPEP de pouvoir faire encore le dos rond grâce à un bas de laine bien rempli. Et tout le piège est là, pour un pays comme l’Algérie.

L’Algérie ne fait pas partie des trois pays qui ont officiellement exprimé leur volonté de faire baisser la production de l’OPEP le 27 novembre prochain à Vienne. Alger ne peut pas, sur un marché débridé du pétrole, se rattraper sur les volumes. Elle ne remplit plus tout à fait son quota de production. L’Algérie a donc objectivement intérêt à une remontée des cours bien plus que la plupart des membres de l’OPEP. Ce sont pourtant le Vénézuela, l’Equateur et un représentant de la Libye qui vont pousser l’organisation à examiner un retour au plafond de 29,5 millions de barils/jour de production, aujourd’hui dépassé d’un demi million selon les experts.

Au fond, Alger fait bien de garder profil bas. Elle n’a pas la main sur ces enjeux. Pas la main, certes, mais non sans aucune influence. L’Arabie Saoudite ne s’est pas exprimée contre une baisse de la production OPEP, même si Riad estime qu’elle ne conduira à rien en ce moment. Il n’est donc pas tout à fait impossible de faire évoluer la position saoudienne vers un accord de baisse a minima. Pourquoi ? Parce que l’autre stratégie, celle qui consiste, pour les gros producteurs, à continuer à inonder un marché déjà excédentaire va déboucher tôt ou tard sur la faillite des gisements les plus couteux. En tête, la filière américaine du pétrole de schiste sans laquelle l’industrie du non-conventionnel serait « une vraie bulle financière » pour reprendre l’expression du professeur Omar Aktouf sur Radio M. Le lobby pétrolier américain, devenu celui du gaz de schiste, a objectivement intérêt à ce que l’Arabie Saoudite se remette à jouer son rôle de variable stratégique d’ajustement de la production mondiale de pétrole. Ce que Riad est tenté de retarder au maximum pour amener l’Iran à participer de manière conséquente à ce rôle d’ajusteur de marché. D’où les incertitudes qui entourent la réunion du 27 novembre 2014. Le fait est donc que le retrait de 500.000 barils jours, répartis sur les membres de l’OPEP, ne suffira sans doute pas à stabiliser puis redresser les cours en 2015 lorsque l’hiver de l’hémisphère nord sera de la partie. Il faudra plus. Et donc une rediscussion à la baisse des quotas de l’organisation. Scenario périlleux pour la délégation algérienne qui arrive au pire moment de la courbe de production de l’Algérie pour parler d’avenir.

Si l’Algérie ne milite pas ouvertement pour une baisse de la production de l’OPEP comme elle l’a fait en 2008, avant la réunion d’Oran, ce n’est pas parce qu’elle dispose de près de 200 milliards de dollars de réserves de change et qu’elle peut voir venir. Mais parce qu’elle aura du mal à défendre son quota actuel de production si l’organisation venait à renégocier les quotas à la baisse pour chaque pays. Et pourtant plus que jamais, Alger, pas en lice pour une guerre des parts de marché, ne peut compter que sur la reprise des cours.

Mohamed Laksaci, le gouverneur de la Banque d’Algérie, a mis dix ans pour se rendre compte que les entreprises algériennes peuvent faire des acquisitions à l’étranger. C’est en soi la preuve qu’il ne faut désespérer de rien. Mais voila que son règlement sur les modalités de financement des opérations de capitaux à l’étranger soulève le mécontentement de ceux qu’ils devaient aider. Le président de CARE, le think tank de l’entreprise, Slim Othmani, déclare que la banque centrale a rendu plus dures les conditions de transfert de capitaux à l’étranger pour investir, tandis que l’expert financier Farid Bourenani, sherpa de Issad Rebarb dans la plupart de ses opérations d’acquisition à l’international, estime que le texte de la Banque d’Algérie va ôter « les effets d’aubaine » devant les entreprises algériennes en lice pour faire une bonne affaire à l’étranger.

Qui revendique la libéralisation des transferts de capitaux pour l’acquisition d’actifs par les entreprises algériennes ? Les chefs d’entreprises algériens. Qui est frustré par le texte qui est censé autoriser et réguler cette possibilité d’investir à l’étranger ? Les chefs d’entreprise algériens. Le board de la Banque d’Algérie aurait peut-être gagné à consulter les premiers concernés avant de pondre son texte. Mais est-il sérieux de demander deux « ijtihad » par décennie au gouverneur de la Banque d’Algérie ? 

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