Pour étudier l’évolution des prix dans le secteur de l’énergie, on doit s’en ternir aux fondamentaux en plus des enjeux géostratégiques.
Pour la prochaine réunion des pays OPEP/non OPEP, le 17 avril 2016, quel sera l’impact sur les prix qui ont fortement chuté à l’approche de la réunion dont le WIT a clôturé le 15 avril 2016 à 40,52 dollars et le Brent à 43, 18 dollars après avoir atteint 24h avant la barre de 45 dollars avec un cours euro/dollar de 1,138 ? Nous avons le grand absent, les Etats Unis d’Amérique qui est un des plus grand producteur et bientôt un des plus grand exportateur , les cas spécifiques de l’Iran qui a prévenu qu’il comptait avant toute chose atteindre une production de 4 millions de barils par jour et dont le Ministre ne sera pas présent à la réunion, et n’envisagerait un gel de sa production qu’une fois ce seuil atteint. Nous avons également l’Irak, concurrent direct de l’Arabie Saoudite avec un cout inférieur de 20%, et la Libye qui ont besoin de financement pour reconstruire leurs économies sans compter les nouvelles découvertes et mutations énergétiques mondiales.
1.- Le Fonds monétaire international (FMI) dans son dernier rapport du 12 avril 2016, révise à la baisse les perspectives de croissance de l’économie mondiale de 3,1 à 3,2% pour 2016 contre une prévision de 3,4% et de 3,5% en 2017 Dans un discours prononcé devant le who’s who de la finance mondiale réuni à Washington pour les traditionnelles réunions de printemps du Fonds et de la Banque mondiale, M. Obstfeld ancien conseiller économique du président américain Barack Obama, n’a pas caché son inquiétude soulignant avec force que « nos prévisions sont de moins en moins optimistes ». Malgré les politiques monétaires accommodantes ( (taux d’intérêt presque zéro) tant de la FED que de la BCE, la demande, qu’il s’agisse de la consommation ou de l’investissement, est en berne. Les différents scandales révélés au niveau mondial par le « Panamla papers » mais qui concerne d’autres paradis fiscaux qui devraient être dévoilés prochainement impliquent l’amélioration du fonctionnement du système monétaire international, la stabilité financiers des marchés, et surtout la moralité des relations internationales par une plus grande coopération internationale qui touche également la lutte contre le terrorisme qui est une , menace planétaire. Le Brésil plongé dans une grave crise politico-financière, et la Russie, devraient connaitre la récession en 2016/2017 avec un PIB en recul en 2016 respectivement de 3,8% et 1,8%. La Chine n’aurait qu’une croissance de 6,5% avec le risque de créer de nouvelles turbulences financières. Le FMI prévoit une croissance faible pour les économies avancées : ses estimations pour les Etats-Unis comme la zone euro sont encore plus faibles que prévues (−0.2 point), avec une croissance de 2,4 et 1,5 % respectivement et même le Japon devrait connaitre une récession en 2017. D’une manière générale, selon le FMI , « la faiblesse de l’activité manufacturière et du commerce ne s’explique pas seulement par l’évolution de la Chine mais aussi par le caractère « modéré » de la demande et de l’investissement en général. Les tensions financières dans de nombreux pays exportateurs de pétrole réduisent la capacité de ces pays à atténuer le choc, ce qui entraîne une baisse considérable de leur demande intérieure. » Les investissements dans l’extraction de pétrole et de gaz ont diminué, « ce qui ampute aussi la demande globale ».Aussi les Perspectives n’incitent pas à l’optimisme. « Les risques sont plutôt de nature baissière », selon le FMI les listant : un ralentissement plus net de la Chine, une appréciation plus forte du billet vert et un durcissement des conditions de financement à l’échelle mondiale, une poussée de l’aversion au risque à l’échelle mondiale et une escalade des tensions géopolitiques. Ces incertitudes contribueraient selon le FMI : « à dérailler la croissance mondiale si ces écueils ne sont pas bien gérés ».
2.- les pays du CCG ont enregistré en 2015 un déficit total de 160 milliards de dollars (140 milliards d’euros) contre un excédent global de 220 milliards de dollars (193 milliards d’euros) en 2012. Les pays membres du Conseil de coopération du Golfe (CCG) devront emprunter entre 250 et 342 milliards d’euros d’ici 2020 pour financer leurs déficits budgétaires résultant de la chute des cours du pétrole selon le rapport du Kuwait Financial Centre (Markaz) de mars 2016. L’Arabie saoudite, Bahreïn, les Emirats arabes unis, le Qatar, Oman et le Koweït, qui dépendent lourdement des revenus pétroliers, devraient cumuler un déficit de 318 milliards de dollars (279 milliards d’euros) pour les seules années 2015 et 2016. A l’exception de Bahreïn et d’Oman, les autres membres du CCG disposent toutefois d’énormes réserves et d’une faible dette qui leur permettent de mobiliser facilement des emprunts sur leur marché intérieur et à l’international. Et les pays les durement touchés sont respectivement le Nigeria (baisse drastique des réserves de change 28 milliards de dollars en 2015 avec un taux d’inflation de 10%) , le Venezuela (en semi –faillite avec 180,5% de taux d’inflation en 2015 et des réserves de change inférieures à 15 milliards de dollars ), la Russie dont le rouble a perdu plus de la moitié de sa valeur (65,94 un dollar et au cours de 40/50 dollars, ses réserves de change risquant de s’épuiser horizon 2020)
3.- Environ 96 millions de barils par jour ont été produits en mars 2016 et qu’un accord soit trouvé ou non à Doha, l’offre va rester excédentaire, et la demande pourrait même baisser, si la croissance mondiale est décevante. Le prix pourrait évoluer entre 30 et 50 dollars maximum selon l’Agence internationale de l’Energie Dans ce cadre, la prochaine réunion des pays OPEP/non OPEP, il faut éviter les analyses euphoriques ne devant pas s’attendre selon l’AIE à une remontée spectaculaire, le prix d’équilibre du pétrole étant fondamentalement déterminé par une entente entre les USA, non concerné par cette rencontre et l’Arabie Saoudite et à un moindre degré par la position de deux autres grands producteurs, l’Iran et l’Irak qui entendent accroitre leur production. Depuis des années, existe une méfiance entre la Russie dont la production a atteint un niveau jamais égalé en 2015 et l’Arabie Saoudite et qu’en sera-t-il au cours de dette réunion ? Le cours du pétrole a subi certes une légère remontée les 12/14 avril 2016 et a baissé en fin de journée du 15 avril 2016. Pour de fausses interprétations , il faut s’en tenir aux fondamentaux qui son la croissance de l’économie mondiale comme mis en relief précédemment, la production de pétrole (non conventionnel) des USA qui bouleverse toute la carte énergique mondiale qui exportera en 2017 en Europe, les rivalités au niveau de l’OPEP dont certains ne respectent pas les quotas, bien que cette organisation représente que 35/40% de la production mondiale commercialisée, 60/65% se faisant hors OPEP, de la rivalité Iran-Arabie Saoudite (plus de 35% de la production OPEP), qui ne veut pas perdre ses parts de marché, la stratégie expansionniste de Gazprom, du retour sur le marché de la Libye, de l’Irak, de l’Iran , avec des réserves de 160 milliards de barils de pétrole lui permettant facilement d’exporter entre 4/5 millions de barils jour et le deuxième réservoir de gaz traditionnel avec plus de 34.000 milliards de mètres cubes gazeux , l’efficacité énergétique avec une prévision de réduction de 30% dans les pays développés, horizon 2017-2020 avec pour objectif stratégique une transition énergétique maîtrisée, en rappelant les importantes résolutions lors de la rencontre de la COP21 à Paris à sur le réchauffement climatique notamment dans le bâtiment, l’industrie et le transport étant à l’aube d’une quatrième révolution industrielle et enfin être attentif aux stocks américains et chinois, des cotations du dollar et l’euro, toute hausse du dollar, avec la décision récente de la FED de relever le taux d’intérêt influe à la baisse le cours du pétrole, bien que n’existant pas de corrélation linéaire.
D’une manière générale le monde est à l’aube d’une quatrième révolution industrielle et c’est une erreur stratégique de raisonner sur un modèle de consommation énergétique linéaire du passé, devant s’en tenir aux fondamentaux. , l’excédent s’étant chiffré à 2,52 millions de barils par jour au premier trimestre 2016, il est fort probable un impact mitigé de la réunion des pays OPEP/non OPEP, la Russie et l’Arabie Saoudite, les autres pays présents étant marginaux. Aussi, il n’y aura pas une remontée spectaculaire – 50 dollars maximum en cas d’une entente relative, moins de 40 dollars en cas d’un désaccord- étant entendu que c’est un gel de la production et non une diminution.
(*) Dr Abderrahmane MEBTOUL, Professeur des Universités, Expert International- directeur d’Etudes Ministère Energie/Sonatrach (1974/2007)