À l’exception peut-être du groupe ETRHB Haddad, ou du géant public Cosider, aucune entreprise de BTP, nationale ou étrangère, n’a eu le privilège d’accéder à autant de commandes publiques en Algérie que la China State Construction Engineering Corporation (CSCEC).
Elle construit la grande mosquée d’Alger, un projet à 1,5 milliard de dollars, et la nouvelle ville universitaire de Constantine (57 000 places pédagogiques) pour 520 millions USD. Tout récemment, elle vient d’être présélectionnée pour la réalisation de la nouvelle extension de l’aéroport d’Alger, dite « Aérogare Ouest », un projet estimé à 550 millions de dollars. La China State Construction Engineering Corporation (CSCEC) vit une véritable success-story en Algérie.
L’histoire de cette entreprise publique chinoise dans le pays remonte aux débuts des années 80, à travers ses contributions dans la réalisation du programme d’urbanisation lancé par le gouvernement algérien, notamment la planification de la ville nouvelle de Boughezoul, implantée dans les wilayas de Médéa et de Djelfa sur les territoires des communes de Boughezoul et d’Aïn Oussera, dans ses phases 1 et 2 ainsi que celle de Sidi Abdellah d’Alger. Au rythme des contrats obtenus, la CSEC a fini par créer une filiale locale en janvier 1982, la China Construction Algeria Co.Ltd en l’occurrence. Or, cette facilité à obtenir des contrats en Algérie est observée aussi bien pour les grands projets comme les petits, dans tous les secteurs d’activité que compte l’entreprise chinoise. Y compris dans ses moments les plus difficiles, lorsqu’elle s’est vue intégrée, en novembre 2009 par la Banque mondiale (BM), sur sa liste noire des entreprises interdites de contrats avec l’institution pour des faits avérés de corruption.
Plusieurs milliards de dollars de commandes publiques
La présence de l’entreprise en Algérie est marquée par des réalisations livrées ou en cours de construction dans plusieurs secteurs d’activité, aussi divers que les travaux publics, le bâtiment, l’hôtellerie et l’installation d’usines. Et au vu de l’importance et du nombre de ses chantiers, son drapeau fait désormais partie du paysage algérien. Pour ce citer que ses réalisations les plus récentes, la CSCEC a construit, le Sheraton Club des pins d’Alger, inauguré en 2001 à l’occasion du 35e sommet de la ligue arabe en 2005 pour un montant de 69 millions de dollars américains (USD) ; l’École Supérieure d’Hôtellerie et de Restauration d’Alger (ESHRA), qui ouvrira ses portes en septembre prochain pour un montant de 165 millions USD ; l’aérogare internationale de l’aéroport Houari Boumediene d’Alger, mise en service en juillet 2006 pour un montant de 266 millions USD ; les gros œuvres pour le nouveau siège du ministère des affaires étrangères (les finitions ont été confiées aux Egyptiens d’Arab Contractors) ; la réalisation logements AADL en 2002 avec 43.000 unités réparties sur 11 wilayas ; les études pour la réalisation du Cercle national de l’armée de Beni Messous (2007), l’Hôtel Mariott de Tlemcen pour 145 millions USD et l’autoroute Cherchell-Bou Ismail (Tipaza) sur 48 Km.
La CSCEC a aussi construit les 53 Km de la section Chiffa de la route nationale n°1 avec, à la clé, 17 Km de ponts et 3 Km de tunnels.
Le marché de la mise à niveau du stade du 5 juillet lancée pour sa première tranche, qui consiste à réhabiliter les 2.960 sièges des gradins supérieurs, a également été attribué à la CSCE pour un montant de 20 millions USD. A Alger, elle a réalisé 400 logements sociaux à Mahelma, 370 à Mohammadia, 280 à Rouiba et 69 logements à Kouba ; le lycée international de Kouba pour 15 millions USD, des groupes scolaires à Ain Naadja, à Alger Centre, à Jolie-Vue I et II et à Garidi (Kouba), à Moubalak et à Badi (El-Harrach) et une polyclinique à Ain Taya.
Dans le domaine des infrastructures hydrauliques, l’entreprise chinoise a construit le barrage de Boukourdane à Tipaza, réalisé l’étude et les travaux de 8 châteaux d’eau à travers le grand Alger ainsi que les travaux d’aménagement hydraulique de la plaine El-Amra El-Abadia et du périmètre de Mitidja-Ouest, de même qu’elle a rénové l’hôtel Mazafran construit un business center aux Pins Maritimes. A Oran, elle a construit le Sheraton pour 96 millions USD (livré en 2005) ; un complexe d’affaires pour 78 millions USD ; un immeuble résidentiel (R+11) ; le Centre hospitalo-universitaire d’Oran ; des minoteries à Mostaghanem, Oumach (Biskra) et Rahmania (Alger) et une usine de détergents à Rahmania.
A Constantine, elle a réalisé un pôle universitaire de 20.000 places pédagogiques ainsi que près de 1.000 logements sociaux. Plus récemment, en 2012 elle a été choisie par l’Etablissement national de la navigation aérienne (ENNA) pour la réalisation des blocs techniques et tours de contrôle des aéroports d’Alger, d’Oran, de Constantine, de Ghardaïa et de Tamanrasset. Des réalisations pour un montant se chiffrant à environ 25 millions USD.
Interdite de marchés par Ouyahia en 2005, elle revient sous Belkhadem en 2007
Le mécontentement des politiques algériens pour des retards accumulés sur certains chantiers ou pour mauvaise qualité des travaux n’inquiètent pas outre mesure la C0SCEC. L’ancien ministre de l’habitat et de l’urbanisme Noureddine Moussa a dû élever la voix en 2008 pour la rappeler à l’ordre, et l’actuel responsable de ce département, Abdelmadjid Tebboune, a eu également à le faire en 2012. A l’époque oùil était chef du gouvernement, Ahmed Ouyahia l’avait même interdite, en 2005 de soumission aux marchés publics. Les travailleurs algériens ont observé et à plusieurs reprises des mouvements de protestation sur ses chantier pour dénoncer des conditions de travail à la limite de l’esclavage (Constantine, février 2013 notamment). Plusieurs administrations l’ont mise en demeure de respecter les délais contractuels de réalisation et de veiller à la qualité des travaux. Mais cette entreprise a toujours trouvé d’heureuses issues à ces crises passagères. A chaque crise, l’ambassadeur de la République de Chine populaire intervient en personne auprès du gouvernement pour calmer le jeu.
C’est en 2007, sous le gouvernement de Belkhadem que la CSCEC a marqué son retour en Algérie, en décrochant le marché de construction de la nouvelle ville universitaire de Constantine pour 520 millions USD. Elle vient d’être mise de nouveau en demeure par la direction des équipements publics de la wilaya de Annaba début juin dernier, et ce, pour avoir abandonné totalement le chantier de réalisation d’une cité universitaire de 3.000 lits, extensibles à 6 000 lits à Sidi Achour, à l’ouest de la ville. La menace de résiliation immédiate de son contrat brandie par cette administration n’a pas été suive d’éffet.
Et les occasions n’auront pas manqué aux responsables algériens de la rassurer sur son avenir dans le pays. La dernière en date était l’accueil « chaleureux » réservé le 24 juin dernier à Pékin par le président de la CSCEC, M. Yi Jun, à une délégation présidée par Abdelhamid Melzi, directeur de l’Etablissement de gestion touristique (EGT) Sahel, qui gère les résidences d’Etat. Selon le communiqué diffusé à l’occasion par l’entreprise chinoise sur son site, « M.Melzi, qui a exprimé son souhait de voir la CSCEC renforcer sa coopération avec l’Algérie afin de réaliser plus de projets, apprécie beaucoup la CSCEC pour ses réalisations en Algérie et aussi sa contribution au développement de son pays ».