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Le pouvoir algérien prépare-t-il un état d’exception pour l’après 17 avril 2014 ?

Par Yacine Temlali
avril 15, 2014
Le pouvoir algérien prépare-t-il un état d’exception pour l’après 17 avril 2014 ?

 

En multipliant les accusations de recours à la violence contre le candidat Ali Benflis, le régime de M. Bouteflika serait en train de préparer l’opinion à une situation d’exception le lendemain du 1er tour des présidentielles prévu pour le 17 avril 2014.

 

L’assassinat d’un jeune homme à Zeralda, le 13 avril 2014, par un sbire des promoteurs de la candidature de Bouteflika révèle, à coup sûr, l’état d’esprit des partisans du 4ème mandat, rameutés de partout pour le dernier meeting de la campagne électorale. Tout porte à croire qu’ils sont en proie au doute. L’instrumentalisation de la violence est, semble t-il, envisagée pour se donner une opportunité de prendre en main la situation au cas où le jour du scrutin, les choses ne se passeraient pas comme prévu : l’annonce d’un plébiscite de Bouteflika.

Les contestations pacifiques qui ont jalonné la campagne électorale et, probablement la montée en puissance des partisans de Ali Benflis, qui pourraient trouver un terrain d’entente avec le mouvement du « refus de l’élection » pour, aller au-delà de la traditionnelle dénonciation de la fraude, paraît de plus en plus envisageable.

Sur le registre de la violence, le déplacement impromptu d’Abdelmalek Sellal à Ghardaïa le 9 avril dernier, qui a constitué le point de départ de la reprise des affrontements dans la vallée du M’Zab, ne pouvait sérieusement être envisagé par une équipe dont le souci premier est de veiller à un déroulement serein de la campagne électorale. Ceci est d’autant plus vrai que cette décision est survenue au lendemain des violences qui avaient marqué le déplacement raté du directeur de la campagne électorale de M. Bouteflika à Bejaia le 5 avril 2014.  

 

Préparer l’opinion aux pires scénarios

 

Au vu de la tournure des événements, les propos tenus au chef de la diplomatie espagnole par le Chef de l’Etat, et dans lesquels il a exprimé son inquiétude devant les violences survenues lors de la campagne électorale, ne peuvent être qualifiés de simple bourde, surtout qu’ils ont été diffusés sur la chaîne de télévision officielle, l’ENTV. Ils ne peuvent pas non plus être mis sur le compte de l’impotence de M. Bouteflika comme il est suggéré par différents écrits dans la presse nationale. Il s’agit, selon toute vraisemblance, de préparer l’opinion internationale à une probable situation d’exception au lendemain du 17 avril prochain dans le cas où le scénario prévu serait contrarié.

Muré dans un silence abyssal durant la campagne de la promotion de sa candidature, M. Bouteflika multiplie les mises en garde à l’endroit du candidat Ali Benflis allant jusqu’à évoquer explicitement l’ingérence étrangère à laquelle aurait appelé son ancien Premier ministre, démentant du coup les propos tenus par son directeur de campagne. En effet, A. Sellal, le même jour, lors de l’émission de la Radio nationale « L’invité de la rédaction », avait estimé que globalement la campagne s’était « déroulée sans grands accros ».

Sur ce registre des dangers de l’ingérence étrangère, Louisa Hanoune s’est chargée de persuader l’opinion des velléités qu’aurait M. Benflis d’aller vers un scénario ukrainien ou ivoirien en se proclamant « président élu ». Ce rôle « dévolu » clairement au numéro un du Parti des Travailleurs, nous l’avons déjà évoqué dans Maghreb Emergent juste après le tête-à-tête qu’elle a eu avec le chef d’Etat major, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah. Cela étant, il n’est par sûr que son discours, servi dans une litanie de certitudes et d’invectives, ait atteint son but dans une opinion largement acquise au changement.

Si d’aucuns pensaient que la visite de John Kerry a permis d’entériner un accord au sommet entre les factions rivales dans le système politique algérien, on peut penser que la crise du régime est telle qu’elle met en jeu, non plus un partage d’intérêts mais un chevauchement de sphères d’intérêts qui fragilise la durabilité de tout compromis. A court terme, le danger pour le pays réside dans cette équation.

A voir les multiples contestations pacifiques de la jeunesse (y compris par le biais des réseaux sociaux), qui a saisi l’opportunité de cette campagne pour faire entendre sa voix, il est fort à parier que la rue ne va pas manquer de se saisir de cette crise comme d’une aubaine tombée du ciel pour peser sur le cours des événements. Et, cela quelle que soit l’issue du scrutin. Plus que jamais l’avenir du pays se joue après le 17 avril.

 

(*) Rabah Saïd est cadre universitaire.

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