Edito: Les Algériens prêts à repasser en mode conquête

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L’Algérie s’apprête à entrer dans  une nouvelle période politique. Celle des conquêtes démocratiques qu’autorise la remise en mouvement des citoyens dans l’espace où se décide leur destin, l’espace politique. Les Algériens en étaient absents depuis près de 20 ans.

Depuis le printemps noir kabyle de 2001 qui avait déferlé sur Alger de sa revendication notamment contre l’impunité. Deux raisons ont entretenu le quasi-renoncement des Algériens à leurs droits politiques : la peur de rechuter dans la fitna des années 90 et l’attachement au confort de la redistribution de la rente. Une majorité des jeunes qui ont symboliquement sonné la mort du Bouteflikisme ne connait pas la hantise de la guerre civile et n’émarge pas assez à une rente qui s’amenuise pour accepter de s’effacer. Elle était en position de sortir du contrat implicite des années Bouteflika : garantie de paix et d’Etat providence contre acceptation d’un pouvoir oligarchique et autoritaire.

Contrat de plus en plus asservissant, humiliant. De moins en moins intégrateur, soutenable. En moins de deux semaines, la clé de voute de ce contrat s’est fracassée. La génération de la libération nationale est en insupportable dépassement de mission.  La personne du président Abdelaziz Bouteflika est devenue l’objet du rejet populaire.  D’abord dans des villes de l’intérieur par effets éruptifs. Maintenant, à Alger en mode levée de lame de fonds.

Les Algériens reviennent à la politique par l’angle sur lequel il n’est jamais sage de les sous-estimés. Celui de leur dignité décotée. Les distributions de logements sociaux et les promesses d’arrêt des poursuites judiciaires contre les jeunes qui n’ont pas remboursé leur crédit dénotent le décalage. Le contrat des années Bouteflika est mort. Et les mesures électoralistes y ressemblent à un acharnement thérapeutique. Les Algériens ne veulent plus se laisser acheter. Plus être tenu en chantage d’insécurité.

Ils savent que le temps perdu dans la queue de comète du Bouteflikisme menace chaque jour  un peu plus leur avenir. Ni la paix ni l’État providence n’y survivront. Sauf s’ils se remettent en mode de conquête citoyenne. C’est ce basculement historique vers l’action collective qui va ouvrir dans les semaines et les mois qui viennent une nouvelle période politique.  A l’échelle de l’histoire d’un pays jeune et en construction comme l’Algérie, cela n’arrive que tous les trente ans. Mais lorsque les citoyens entrent dans l’équation du destin, rien ne s’écrit plus à l’avance. Le 5e mandat de Bouteflika prend les allures du discours de Chadli Bendjedid du 19 septembre 1988. Il donne un ultime recours à l’esprit de désobéissance. Celui en fait du bon sens de la grande Histoire. Le recours à la rue devient légitime. Il rappelle le principe essentiel de la vie de la cité. Le gouvernement ne tient pas son autorité de Dieu, du roi ou du calife. En république, il le tient du peuple. Et le peuple veut tourner la page de Bouteflika et de son système.

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