En Libye, les institutions de la transition sont fortement fragilisées et leur légitimité contestée. Une tendance confirmée, jeudi, par le recul de la participation à l’élection d’une assemblée constituante.
Les Libyens n’ont pas fait preuve d’enthousiasme, jeudi 20 février, pour l’élection d’une soixantaine de représentants de l’Assemblée qui aura la délicate tâche de rédiger une constitution pour le pays. Le taux de participation a été estimé à 45% par le président de la Commission électorale qui s’est déclaré « satisfaite » du déroulement de l’opération électorale. Mais comparativement aux premières élections libres organisées en juillet 2012, le reflux de la participation est net et traduit clairement un désenchantement de la population face à une situation de faillite de l’Etat incapable de réduire le poids des milices. Seuls 1,1 million se sont inscrits pour le scrutin de jeudi contre plus de 2,7 millions en 2012. Ces 1,1 millions d’inscrits représentent moins du tiers des électeurs libyens potentiels, estimés à 3,4 millions d’électeurs éligibles. Les résultats seront annoncés dans les prochains jours et ne concerneront que 47 sièges sur 60. Des incidents violents ont en effet entravé le scrutin dans le sud et à Derna.
Les Amazighs boycottent
Dans l’ouest du pays, les Amazighs, qui doivent disposer de deux sièges dans la Constituante, ont décidé de boycotter le scrutin. Sur les 60 sièges de la future Constituante, six sont réservés aux minorités (Toubou, Amazigh et Touareg), et six aux femmes. Officiellement, les partis politiques n’y participent pas et seules les candidatures individuelles ont été acceptées. Au total, 692 candidats sont inscrits pour ces élections, dont 73 femmes, selon la Commission électorale. Les Amazighs se sont dit déterminés à ne pas y participer en raison de l’absence de mécanismes qui garantissent les droits culturels dans la future Constitution. Il est donc attendu à ce que la Constituante ne compte que 58 membres au lien de soixante. Le Conseil supérieur des Amazighs de la Libye a décidé de faire du jeudi une « journée noire et de deuil dans les régions » amazighes, en particulier dans l’ouest du pays. Il a indiqué dans un communiqué qu’il ne reconnaitra pas la future constitution. Le recul sensible du taux participation risque d’entacher la crédibilité de la Constituante dans un pays où le Congrès général national (CGN), la plus haute autorité politique et législative issue des élections de 2012, est fortement critiqué pour son incapacité à rétablir l’ordre. La décision du CGN, dont le mandat expirait normalement le 7 février, de prolonger son mandat a suscité la colère d’une partie des libyens et des milices. Des rumeurs de coups d’Etats se sont multipliées alors que les membres du CGN ont fait mine de reculer en s’engageant à tenir des élections anticipées. Mais aucune date n’a été annonce pour la tenue de ce scrutin. Aucune indication n’est encore donnée sur sa nature : sera-t-il législatif uniquement ou bien concernera-t-il également la présidence ?