La Libye accuse le géant américain de la finance Goldman Sachs d’avoir sciemment mis à profit l’inexpérience des responsables de la Libyan Investment Authority (LIA) pour empocher 350 millions de dollars sur une transaction d’un milliard de dollars. L’affaire est désormais portée devant la Haute Cour de Londres.
La Libyan Investment Authority (LIA, Autorité libyenne d’investissement), mise en place en 2006 pour gérer les revenus pétroliers du pays, a accusé la banque d’investissement américaine d’avoir conquis « la confiance » de ses responsables, « insuffisamment informés », et de les avoir convaincus de se lancer sur le marché des produits dérivés. Le fonds souverain libyen accuse le géant de la finance d’avoir « profité de manière abusive de la faiblesse de la LIA » pour l’inciter à conclure neuf transactions à base de produits dérivés, avec entre autres Citigroup, EdF, Santander et ENI, dans le but d’obtenir « de substantielles marges de profit » sur leur valeur totale d’un milliard de dollars (740 millions d’euros). Pour y parvenir, Goldman Sachs n’a pas lésiné sur les moyens : voyages de luxe au Maroc, stage dans des bureaux. Le personnel faiblement qualifié et très incompétent de la LIA aurait été mené en bateau par Goldman Sachs qui n’a pas laissé passer l’aubaine. Les transactions conclues sur les conseils de Goldman Sachs se sont avérées foreuses et ont perdu la « quasi-totalité de leur valeur ». Goldman Sachs s’en est tiré malgré tour avec un profit de 350 millions de dollars. La porte-parole de Goldman Sachs a qualifié la plainte « sans fondement » et a annoncé que la banque « la combattrait avec vigueur ».
98% de l’investissement a disparu dans la spéculation
L’affaire n’est pas nouvelle. En juin 2011, le Wall Street Journal faisait état d’une enquête de la Security and Exchange Commission (SEC), organe de surveillance de la Bourse américaine, pour déterminer si la banque d’affaires Goldman Sachs avait enfreint la loi dans ses relations d’affaires avec le Fonds souverain d’investissement Libyan Investement Authority (LIA). Il affirmait que Goldman Sachs aurait eu l’intention de verser au fonds libyen une commission «compensatoire» de cinquante millions de dollars pour le dédommager d’une perte monumentale de plusieurs centaines de millions de dollars. Entre janvier et juin 2008, LIA avait versé 1,3 milliard de dollars à la banque américaine pour des investissements sur les marchés financiers. En février 2010, de ce capital, il ne restait plus que 25,1 millions de dollars, 98% de l’investissement libyen a disparu dans les opérations spéculatives dans lesquelles Goldman Sachs s’était engagée. Un expert algérien avait souligné que le fonds libyen a été le « dindon d’une farce très couteuse » que les banquiers n’expliquent pas. Selon lui, les « investissements à risque sont très généralement «bordés», c’est-à-dire qu’ils sont encadrés de sorte à ce que les pertes éventuelles restent limitées à des niveaux raisonnables ». Or, le client libyen s’est retrouvé à assumer, seul, les choix hasardeux de gestionnaires de fonds peu scrupuleux. Les libyens n’auraient même pas été informés de l’évolution catastrophique de leurs placements par Goldman Sachs.