Manifestation de dimanche : Les algérois défient l’interdiction une deuxième fois (Récit)

Manifestation de dimanche : Les algérois défient l’interdiction une deuxième fois (Récit)

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La place Audin à Alger-centre a vécu un dimanche 24 février particulier. Les badauds qui ont l’habitude de déambuler dans l’artère principale ont pressé le pas pour vite éviter l’impressionnant cordon sécuritaire qui a été mis en place place Audin. Circulez-y a rien à voir ! d’ailleurs la plus part des boutiques du secteur ont baissé le rideau, la circulation en cette matinée ensoleillée est fluide.  A 10h30 une passante curieuse se fait embarquer par des femmes policières en tenue civile. Le message est clair il est strictement interdit de s’arrêter à la place Audin.

Il est 10h30 et le cordond e sécurité est déjà en place alors que le rassemblement organisé par le mouvement Mouwatana est prévu à midi. L’objet de ce dernier est d’appeler au rejet du 5e mandat du président actuel Abdelzaiz Bouteflika et revendiquer un changement de système politique. Les leaders de ce mouvement sont arrivés un peu avant l’heure prévue pour déjouer l’attention du comité d’accueil.  Dès 11H Me Zoubida Assoul, arrive dans une rue non loin d’Audin. Habillée léger, uniquement un téléphone en main, Me Assoul est déterminée, son regard est droit, ses propos sont fermes et elle dégage une sorte de fierté de voir la jeunesse algérienne s’exprimer et montrer un tel niveau de conscience politique et de civisme. 

11h45  les klaxons commencent  à raisonner et un petit groupe de personnes s’est rassemblé au milieu de la place. Quelques minutes plus tard, Assoul arrive et une vingtaine de journalistes l’entourent immédiatement. Après une petite  déclaration à la presse ses partisans commencent à scander des slogans contre le 5e mandat de Bouteflika. Le groupe s’élargit à une vitesse remarquable. Un autre groupe s’est constitué à une centaine de mètres du côté du boulevard Didouche Mourad. Ce groupe a été empêché d’avancer par les URS. Le premier a été dispersé par une utilisation de gaz lacrymogène.

Détermination

Non sans détermination, les deux groupes arrivent à se rejoindre.  C’est l’arrivé d’une autre figure de proue du Mouvement Mouwatana qui a ranimé les esprits dans la foule. Il s’agit du chef du parti Jil Jadid, Soufiane Djilali qui fait son apparition accompagné de son staff au complet. Malgré les bousculades et l’air pollué par le gaz lacrymogène les protestataires arrivent finalement à marcher sur le boulevard. Dans les rangs des manifestants de nombreuses personnes subissent les effets du gaz évanouissements vomissements, toux et yeux brulés sont leur lot, des passants et des policiers subissent le même sort. Chose qui n’a pas empêché les manifestants d’avancer. 

La police panique

Alors que les leaders de Mouwatana et leurs sympathisants marchent  et que  les URS essayent de les empêcher, un des chefs de cette unité arrive en courant. Il a ordonné ses éléments d’avancer vite vers Meissonnier. Les agents ne comprennent pas les raisons de cet ordre puis voient déferler un grand renfort de manifestants venant de cette direction, ils sont littéralement surpris.

Présence

Aussi surpris les participants à la marche continuent à avancer avec plus d’assurance et beaucoup de joie et de fierté. Sourires, éclats de rires, blagues, chants et selfies, c’est l’ambiance qui a régné. Parmi les participants nous trouvons des familles, enfants, couples, groupes d’amis mélés à des personnalités publiques. Plusieurs partis politiques et organisations ainsi que des chefs d’entreprises et des avocats ont participé à cette action. Nous citons, le FFS, RAJ, LADDH, Radio Voix des Femmes, SOS disparues, Les familles des disparues, Me Mostefa Bouchachi le grand réalisateur Moussa Haddad…

Solidarité

La présence des personnalités publiques, des femmes, vieux et enfants n’a pas empêché les policiers à utiliser le gaz lacrymogène, mais malgré la répression on sent de la solidarité dans le chaudron qu’est devenu la place Audin. Des policiers en tenue ou en civil donnent du vinaigre aux manifestants pour diminuer l’effet de lacrymogène. Un geste qui s’est reproduit pendant toute la journée. Les policiers atteint dudit gaz se sont retrouvés, eux-aussi, entrain d’utiliser le vinaigre offert par les manifestants. Toutes les personnes ayants perdu conscience elles ont été secourues par la police qui appelle ensuite la protection civile présente aussi sur place. 

Nervosité

Malgré cet élan de solidarité, une certaine nervosité a été enregistrée chez la police. Ils n’ont pas utilisé de matraque mais ont utilisé lacrymogène et ont bousculé la foule. Ils ont toléré la présence des journalistes tout en intimidant ceux qui filmaient. Pis encore, il y a eu plusieurs dizaines d’arrestations, les meneurs de la manifestation,  les militants et les activistes ont été les premières victimes des arrestations. Nous citons, Me Zoubida Assoul, Me Abdelghani Badi, M. Soufiane Djilali et plusieurs d’autres militants.

Jeunesse

La chose la plus remarquable et la plus marquante  de la journée a probablement été la jeunesse de la majorité des manifestants. Ils étaient pleins d’énergie et déterminés d’aller jusqu’au bout de leur objectif qui est une nouvelle Algérie, celle de leurs rêves. Vers 15h les meneurs de la manifestation ont pratiquement tous été arrêtés, les plus âgés et ceux qui sont venus avec des enfants ont quitté les lieux. Ce sont les lycéens et collégiens des établissements du secteur qui ont rejoints la manifestation. Un jeune collégien agé de 13 ans est venu de son école directement à la manifestation, il ne comprend pas les enjeux politiques ni ne connait le but de la manifestation mais il sait que c’est contre un pouvoir qui n’a pas offert un niveau de vie respectable à ses parents, il est aussi confiant dans ses actes car tout le monde chez lui n’apprécie pas ce pouvoir. C’est jeunes écoliers se sont rassemblés dans une ruelle entre le boulevard Didouche Mourad et le boulevard Mohamed V, avant que les force de l’ordre ne les dispersent avec du gaz lacrymogène.

Dispersion

 Vers 16H, il ne reste pas beaucoup de manifestants sur place, les policiers fatigués et à cran embarquent à tour de bras les derniers récalcitrants, les autres ont été canalisé vers plusieurs boulevards, tels que Hassiba Benbouali, Colonel Amirouche, Mohamed V et l’ex rue Mulhouse. Tard dans la nuit tous les détenus ont été relâchés.   

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