L’Algérie célèbre coup sur coup Yennayer, le 12 janvier, puis le Mawlid Ennabawi (naissance du prophète MohamedQSSSL), le 14 janvier. Une commémoration qui ne va pas sans controverse.
Les pétards ont envahi l’Algérie, à la veille de la célébration du Mawlid Ennabaoui, qui sera célébré mardi, jour férié. Pourtant, l’importation et la vente de pétards sont officiellement interdites en Algérie. Ce qui pousse Mohamed Tahar Boulenouar, président de l’Union des commerçants et artisans algériens (UGCAA), à proposer une solution aussi simple que radicale : autoriser les produits pyrotechniques, en réglementer le commerce, et organiser le marché, plutôt que de les interdire, mesure jamais réellement appliquée.
Selon M. Boulenouar, la vente de pétards est interdite depuis une loi de 1963, un texte « impossible à appliquer ». Pourtant, note-t-il, jamais le pays n’a manqué de produits pyrotechniques, vendus publiquement, dans toutes les rues et dans toutes les villes du pays. Les estimations les plus souvent citées font état de 20 milliards de dinars (250 millions de dollars) de produits ainsi commercialisés au vu et au su de tous, mais en dehors de tout contrôle légal.
Ces produits sont « sensibles ». Ils sont considérés comme « de la matière première potentielle pour les explosifs », utilisés par les groupes terroristes, note un ancien officier supérieur de l’armée. Malgré leur caractère dangereux, l’Etat n’arrive pas à contrôler les circuits qui les importent, ni ceux qui les distribuent. La presse évoque de « puissants barons » qui contrôleraient le réseau, sans jamais en apporter la preuve.
Produits dangereux
Les engrais, produits à priori beaucoup moins dangereux, sont strictement contrôlés, depuis que des enquêtes ont montré leur utilisation par terroristes pour fabriquer des bombes. La commercialisation des engrais est soumise à une procédure particulièrement lourde et contraignante. Leur transport se fait par convois protégés, gérés par la gendarmerie. « Il faut quatre à cinq jours pour amener un convoi de Skikda ou Annaba, région de production dans l’est, vers la plaine du Chléliff », dans le centre-ouest, selon un commerçant agréé à Chlef. Le passage des convois d’une wilaya à une autre obéit à une procédure stricte, pour éviter des utilisations douteuses, dit-il.
Mais cette année, c’est un autre cocktail qui a fait des étincelles en Algérie. La célébration du Mawlid, le 14 janvier, coïncide en effet avec Yennayer, le nouvel an berbère, fêté le 12 janvier. Une coïncidence qui a soulevé de vives polémiques, avec une opposition ouverte entre islamistes, partisans de la célébration du seul Mawlid Ennabaoui, et des laïcs ou berbérisants, qui voulaient donner un éclat particulier au nouvel an berbère. Le duel est visible dans la presse, mais surtout dans les réseaux sociaux. Pour l’heure, toutefois, la prédominance reste au Mawlid, jour férié, alors que Yennayer ne l’est pas, malgré une forte revendication en ce sens.
Polémique
Une vidéo postée sur Youtube a notamment fait scandale. On y voit un imam salafiste affirmer qu’au Maghreb, « une secte » (ta’ifa) veut ramener la région au zoroastrisme (madjoussia), religion des adorateurs du feu de la Perse ancienne. La vidéo a suscité une levée de boucliers, avec des commentaires d’une rare violence.
Plus pratique, un blogueur se demande « pourquoi l’Etat algérien entretient cette ambiguïté », avec des administrations locales qui refusent aux associations de célébrer Yennayer, alors que l’Etat algérien organise une cérémonie officielle, placée sous le haut patronage du président de la république ? Cette année, la cérémonie, organisée par une institution officielle, le Haut-Commissariat à l’Amazighité, a été organisée à Tébessa, dans l’est algérien, ville du poète et polémiste Adel Sayad, engagé dans une guerre sans fin contre les islamistes.
Le ministre des transports Amar Ghoul, chef du parti islamiste « Tadj », a lui aussi provoqué un tollé en affirmant qu’il ne célèbrerait pas Yennayer parce qu’il est musulman. Il a été contraint de faire machine arrière, affirmant que ses propos ont été « mal compris » ou « mal interprétés ».