Nour Meddahi sur Radio M : « Le budget 2016 est un budget d’austérité, les économies doivent être mieux ciblées » (Audio-vidéo) - Maghreb Emergent

Nour Meddahi sur Radio M : « Le budget 2016 est un budget d’austérité, les économies doivent être mieux ciblées » (Audio-vidéo)

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M.Nour Meddahi était l’invité ce mardi de Radio M, Le professeur de la Toulouse School of Economics (TSE) n’est visiblement pas convaincu par les mesures annoncées par le gouvernement algérien pour combattre la crise financière qui s’annonce.

L’universitaire algérien s’inquiète tout d’abord , comme beaucoup d’experts nationaux ,de la situation alarmante des finances publiques. Il prévoit un déficit budgétaire record pour 2015 « après avoir réalisé certaines projections, nous sommes arrivés à un chiffre de 12,2%. En 2014 le déficit était déjà très élevé puisqu’il était de 7% malgré un baril moyen à 100 dollars. Le déficit de cette année sera le deuxième plus gros déficit de l’histoire algérienne derrière celui de 1996». Pour combler ces déficits, le gouvernement utilise l’épargne du Fond de régulation des recettes(FRR). « Il l’a utilisé pour combler le déficit de 2014, il l’utilisera à nouveau en 2015 ; 12% de déficit , c’est environ 20 milliards de dollars». ». Selon Nour Meddahi, le Fonds sera encore utilisé en 2016 et en 2017. Au rythme actuel, il prévoit son épuisement pour le « début de l’été 2017 ».

« Le budget 2016 est un budget d’austérité »

Face à cette situation, le type de riposte annoncé par la loi de finance 2016 comporte des risques élevés selon le co -auteur du « plan de sortie de crise » publié voici quelques semaines par la presse nationale . « Le budget 2016 est un budget d’austérité. La baisse des dépenses de 9% est la plus élevée depuis l’indépendance ». Plus grave encore, pour l’économiste de TSE, la baisse prévue des dépenses d’équipement de 16% menace clairement de casser le moteur de la croissance au cours des prochaines années. « Lors du premier choc pétrolier, la baisse du prix du baril était de la même ampleur que celle d’aujourd’hui, les dirigeants de l’époque ont décidé de diminuer de 10% les dépenses d’équipement. Conséquence, en 1987 et en 1988 le pays a connu une récession et le chômage est passé de 10% à 21% ».

Pour des économies mieux ciblées

Si la baisse des dépenses d’équipement de l’Etat n’est pas la bonne solution, que faire alors pour redresser les finances du pays ? Les dépenses de fonctionnement dont le niveau est prévu en baisse de 3% l’année prochaine semblent relativement incompressibles et ne réservent apparemment pas de marges de manœuvre significatives, même si le professeur toulousain s’inquiète d’un « budget d’action économique et social » qui atteint désormais 12 % du PIB. Une piste envisageable pourrait être « la recherche de nouvelles recettes ordinaires » . Mais « augmenter les impôts dans une situation ou l’économie informelle joue déjà un rôle trop important pourrait poser un gros problème ». En fait le professeur de TSE pencherait plutôt en faveur d’un cocktail de mesures ciblées qui toucheraient un peu tous les domaines . « Les coupes dans les dépenses d’équipement, si elles sont maintenues, doivent être modérées étant donné que l’investissement privé ne peut pas prendre le relais à très court terme ». Il recommande aussi l’annonce d’une trajectoire budgétaire étalée dans le temps pour afficher une vision qui dépasse le très court terme et répartir dans le temps les efforts d’ajustement.

Les subventions aux produits énergétiques n’ont rien de social

Dans ces conditions, le principal gisement d’économie identifié par l’universitaire algérien se situe dans le sillage des propositions faites par de nombreux experts nationaux au cours des dernières années. Il s’agit des subventions implicites dont bénéficient particulièrement les produits énergétiques, carburants et électricité en tête. Elles représentent au total « 17,5% du PIB ». Très couteuses pour la collectivité, elles n’ont en outre « rien de social » selon Nour Meddahi qui en veut pour preuve des enquêtes récentes de l’ONS qui montrent que « 70% de ce type de subventions sont captées par les couches aisées de la population ». La hausse des prix du carburant annoncée par la loi de finance 2016, qui « ne devrait pas dépassé 2 ou 3 dinars » n’est pas à la hauteur des enjeux pour l’économiste algérien .

Dévaluation du dinar : La Banque d’Algérie a fait son travail

Au chapitre de la politique monétaire, Nour Meddahi estime que la Banque d’Algérie,dans la conjoncture présente « a fait son travail ». Il calcule que « Tandis que le prix du baril a reculé de 55% depuis juin 2014, le dinar a été dévalué de 25% par rapport au dollar ». Une dévaluation « comparable à celle de la couronne norvégienne mais inférieure à celle du rouble qui a perdu près de 45% de sa valeur ». Quelles seront les conséquences de la dévaluation du dinar sur l’inflation ? Nour Meddahi est relativement rassurant. Il ne s’attend pas à une inflation à 2 chiffres en 2016. Et pour cause, l’Algérie va être favorisée dans ce domaine par des facteurs externes. L’inflation mondiale est aujourd’hui quasiment nulle et l’euro a perdu près de 20% de sa valeur par rapport au dollar ce qui favorise la baisse de la valeur des produits importés .

Réviser la politique des taux d’intérêt

Un domaine dans lequel le professeur toulousain se montre en revanche beaucoup plus critique est celui de la politique des taux d’intérêt « Il faut diminuer significativement l’écart (spread) entre le taux de prêt à un an et le taux de rémunération des dépôts à terme qui est trop élevée (4,75%). Il devrait être inférieur à 2% ». Il n’est pas normal que la rémunération des dépots ne change pas quelque soit le niveau de la hausse des prix. Les banques font trop de bénéfices sans effort de collecte .Il n’y a pas assez de concurrence dans ce domaine ».
Dans le même esprit, puisque « le gouvernement à annoncé qu’il allait rechercher des financements sur le marché interne », Nour Meddahi recommande, pour donner plus de chances de succès à cette démarche, de « créer des bons du Trésor protégés de l’inflation pour que l’acheteur des bons ne porte pas ce risque ».

Lien vidéo : https://www.youtube.com/watch?v=kr3J8Nch97o

Lien audio : https://soundcloud.com/radiom-la-radio-libre/id-m-nour-meddahi

 

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