Le lancement de la 3G a généré 500 000 nouveaux abonnés en un mois : C’est le chiffre de la semaine. Estimation d’un consultant des TIC, Younes Grar, connu pour sa compétence et sa liberté de parole. Ce chiffre est une bonne nouvelle. Il dit que les Algériens poussent à la numérisation de leur vie quotidienne. Un marché transversal assis sur un grand bassin d’emplois à haute qualification. 100 000 postes rien que dans la e.administration, selon Younes Grar. Mais la nouvelle n’est pas bonne pour tous. La ministre des PTIC, Mme Zohra Derdouri, et l’ARPT, ont misé sur un chemin de croissance bas de la 3G. Trois millions d’abonnés en trois ans. Ils pourraient bien être atteints dès la première année. Ce n’est pas une anodine erreur de prévision. La gouvernance des TIC travaille sur des scénarios non actualisés.
Avec des ressources humaines désabusées. Inertielles. Tout a été pourtant fait pour empêcher un départ en trombe de la 3G, faute de pouvoir continuer à en priver les Algériens : double numérotation, activation par présence physique dans les boutiques, autorisation supplémentaire pour le déploiement dans les wilayas. Jamais l’ARPT ne s’est autant démenée pour gêner une opération. La percée de la 3G peut bien sûr se démentir en partie dans les prochaines semaines à cause notamment des mauvaises couvertures réseaux qui font que les débits réels ne sont pas les débits contractuels.
Les opérateurs disent qu’ils vont corriger. Les raisons de penser que l’engouement pour la 3G ira au-delà d’un effet de curiosité avec son lot de déception. Bien sûr, Djezzy qui vient de nommer Philippe Thomer, un profil d’ingénieur à sa tête, va arriver à son tour. Mais surtout la promesse de croissance forte de la 3G, c’est Algérie Télécom qui l’a garantit. Par son incapacité structurelle à développer la connectivité dans le résidentiel. 1,5 million d’abonnés ADSL branchés en… dix ans. La 3G pallie déjà cette paralysie de l’opérateur historique. Et c’est clairement une mauvaise nouvelle pour Algérie Télécom.
Son DG, Azwaw Mehmel, a fini par réagir au souffle du boulet après avoir soutenu que son métier — l’Internet fixe — était à l’abri. Doublement du débit pour le même tarif et bornes publiques wifi dans tout le pays. Mobilis tente de son côté de capter une partie de la demande résidentielle en faisant de son offre Darynet destinée aux maisons non connectées son offre vedette du lancement. Les agences Actel commencent à se dépeupler des files d’attente. Algérie Télécom joue déjà en défense. L’histoire numérique algérienne est au seuil d’un soubresaut. Tout n’est pas perdu.
La France économique s’intéresse à Issad Rebrab cette semaine : Le patron de Cevital a déposé l’offre la plus complète pour la reprise des usines de la filiale française de Fagor-Brandt lâchées par sa maison mère espagnole. Il existe trois autres offres de reprise, mais aucune ne concurrence celle de Cevital prêt à conserver 1200 des 1800 salariés sur les 4 sites de production, ainsi que le siège social et le réseau d’après-vente. La tonalité de cet intérêt pour le président du premier groupe privé algérien n’a rien à voir avec celle de 2002, lorsque la presse française enquêtait sur Abdelmoumène Khalifa, ce jeune milliardaire algérien qui a déboulé dans le paysage, devenant acteur dans l’audiovisuel français, sponsor de l’OM et candidat au sponsoring de Bègles Bordeaux (rugby) sur le territoire de Noël Mamère, l’homme par qui est venu le holà.
Dans le cas de Cevital, nouveau conquérant d’actifs sur le territoire sinistré de l’industrie française, le regard n’est ni bienveillant ni malveillant. Issad Rebrab a déjà sauvé Oxxo, le leader de la menuiserie PVC en France, le printemps dernier. C’est la poursuite de sa stratégie d’acquisition dans l’hexagone qui intrigue. Qui est-il ? D’où vient-il ? La réponse télégraphique est simple : un produit un peu orphelin du capitalisme algérien vieux de cinquante ans, assis sur des commandes publiques hors normes sur le continent africain, et freiné dans sa croissance sur son marché domestique.
Ce qui est curieux, c’est qu’il n’existe, en 2014, pas plus d’acteurs industriels algériens pour saisir des actifs en France et les faire profiter de la demande algérienne et maghrébine en produits, en services, en intégration régionale et en investissements à forte valeur ajoutée. Pour le reste, la relation Rebrab-Montebourg (ministre français du redressement industriel) fonctionne. Son équivalent en Algérie, Rebrab-Benyounes, ne marche pas. Le premier félicite l’Algérien qui sauve des emplois et des activités en France, le second exécute le droit de préemption de l’Etat algérien qui va conduire à la perte totale des emplois de Michelin Algérie. Voilà aussi peut-être pourquoi Cevital et Rebrab deviennent de plus en plus visibles en France.
L’Algérie officielle a été représentée par Mohamed Larbi Ould Khelifa au Forum de Davos : C’est une manière comme une autre de signifier que le pays n’a plus rien à dire de frais au reste du monde. Certes, le forum de Davos n’est plus ce qu’il était à l’époque triomphale de la mondialisation il y a vingt ans. Il n’est plus un club fermé de grands chefs d’entreprise dissertant des moyens de faire baisser les barrières à l’investissement et au commerce dans le monde. Mais tout de même. Davos est encore comptabilisé comme le lieu de rencontre le plus dense entre décideurs de la planète. Avec une dimension prospective et analyse toujours prégnante dans les débats. Alors pourquoi Abdelaziz Bouteflika a-t-il choisi le président de l’Assemblée nationale de 75 ans pour tâter l’avenir à Davos ? Sans doute pour y convaincre en deux clics le monde que son quatrième mandat est «une nécessité nationale».
Article publié par le quotidien El Watan