Le président Abdelaziz Bouteflika a-t-il sifflé la « fin de partie » dans les rudes batailles, devenues publiques, au sein du régime ? Un message très prudent alors que la guerre du sérail s’étale dans la presse et déborde.
Après avoir maintenu un silence de marbre devant les débordements publics des batailles au sein du sérail ouverts par la charge du secrétaire général du FLN, Amar Saadani, contre le patron des services algérien, le général Mohamed Médiene, dit Toufik, le président Abdelaziz Bouteflika semble vouloir tenter de siffler la » fin de partie « . Dans un message de condoléances adressé » au vice-ministre de la Défense nationale, chef de l’état-major de l’ANP, le général de corps d’armée Ahmed Gaïd Salah, et aux familles des victimes du crash d’un avion militaire survenu hier après-midi dans la wilaya d’Oum El-Bouaghi, Bouteflika met en garde les attaques contre » l’Armée nationale populaire (ANP) et les autres institutions constitutionnelles « . « Nul n’est en droit, quelles que soient ses responsabilités, de s’en prendre à l’Armée nationale populaire ni aux autres institutions constitutionnelles » a indiqué le président de la république.
Le message semble, a priori, un désaveu tardif de la sortie, inattendue et sans précédent, du secrétaire général du FLN mettant en cause l’omnipotence du DRS (département recherche et sécurité) et dressant une longue liste de ses » échecs « . La polémique ne cesse d’enfler depuis. Le général Hocine Benhadid, ancien conseiller de Liamine Zeroual, est intervenu à son tour dans les colonnes du journal El Khabar en affirmant qu’un limogeage du général Toufik « risque de créer de l’anarchie au sein de l’armée. Bouteflika sait pertinemment cela. Les attaques dont la source est la présidence sont un non-évènement pour les services ». Benhadid s’en prend au général Gaïd Salah en affirmant qu’il est « sans crédibilité » et « sans poids » au sein de l’armée. Pour Benhadid, le DRS est « un adversaire déterminée de Bouteflika et de son frère Said.
Un «acharnement » sans précédent
Bouteflika, qui n’a toujours pas clarifié les choses sur sa candidature ou non à un quatrième mandat, semble lier les derniers rebondissements des batailles de sérail, à l’approche de l’élection présidentielles. « Nous sommes certes habitués à des dépassements émanant de certains milieux à l’approche de chaque échéance mais, cette fois-ci, l’acharnement a pris une ampleur telle que notre pays n’a jamais connue depuis l’indépendance allant jusqu’à tenter de porter atteinte à l’unité de l’Armée nationale populaire ainsi qu’à la stabilité du pays et à son image dans le concert des nations ».
La formule « certains milieux » est trop vague pour y voir, comme le font certains journaux, un « désaveu » clair de Amar Saadani qui a ouvert cette séquence effectivement sans précédent depuis l’indépendance de l’Algérie. Bouteflika le constate, lui-même, en parlant d’un « acharnement » d’une ampleur «jamais connue depuis l’indépendance ». Le secrétaire général du FLN est-il allé plus « loin » que ce qui lui avait été demandé dans le cadre d’une bataille présumée pour un quatrième mandat ? Le fait est que sa charge a surpris alors que pour beaucoup d’observateurs, le chef du DRS, n’était pas particulièrement hostile à un quatrième mandat. C’est en effet, la première fois dans l’histoire de l’Algérie qu’un politicien » officiel » ouvrait, sous une forme abrupte, le débat sur le rôle des services de renseignement dans la vie publique du pays.
Saadani : le message n’est pas que pour moi !
Amar Saadani dont les adversaires menés par Abderahmane Belayat auraient essuyé un refus de la part de la Wilaya d’Alger pour une demande d’autorisation de la tenue d’un Comité central extraordinaire, réagit avec un certain aplomb au message du Bouteflika. Dans une déclaration au site An-nahar, il affirme que le message du président ne s’adresse pas à lui seulement. Le président a demandé « à tous, sans exception, de ne pas mettre l’institution militaire en danger », a-t-il déclaré. « C’est un message adressé à tous, à tous les niveaux de responsabilité, de ne pas porter atteinte et de ne pas jouer avec l’institution militaire » a-t-il insisté en affirmant de manière sibylline que Bouteflika « prépare une nouvelle étape dans la vie de l’armée nationale populaire.
La » fin de partie » sifflée par Bouteflika aura-t-elle un effet ? Pour certains observateurs, les choses sont allées trop loin pour que cet appel, même lancé dans un contexte dramatique, arrête le bras de fer. La question du 4ème mandat présidentiel, même si des analystes affirment qu’elle n’est pas la cause des disputes actuelles dans le sérail, crée bien une situation de crise au sein du système… Qui a peu de chance de s’estomper après le message de Bouteflika !