Au-delà de la question des prix des offres de la 3G en Algérie, jugés très chers par les usagers, mais qui restent, après tout, du domaine de souveraineté des opérateurs, la qualité de service, elle, doit répondre aux exigences du cahier des charges. Ce qui n’est pas encore le cas.
Le 1er décembre 2013 était considéré par les algériens comme un « jour historique », en ce sens qu’il correspond au lancement officiel du service de téléphonie de troisième génération baptisé UMTS (3G). Mais au lieu d’opter pour des thèmes de couverture et de débits de consommation data, curieusement, la norme technologique 3G++ était le premier logo choisi par les opérateurs pour le lancement de leurs compagnes commerciales. Nombre d’observateurs estiment que ce choix, dénoncé par l’ARPT à travers un communiqué de presse publié par l’APS, s’explique par un doute sur la capacité des opérateurs à atteindre les taux de couverture 3G de leurs territoires exclusifs d’ici la fin de l’année. En effet, à ce jour, aucun des opérateurs n’a voulu dévoiler le nombre de « cellules 3G » mises en place dans chacune des wilayas dont il détient l’exclusivité territoriale pour la première année. Près de six mois après le lancement de la 3G++, quel est le taux de la population couverte par le réseau ? On n’en sait rien. Mais selon différentes sources, au sein des opérateurs, il serait en deçà du chiffre espéré par les rédacteurs du cahier des charges de l’UMTS. Les difficultés enregistrées par les opérateurs dans l’installation des stations BTS 3G, à cause du retard dans la délivrance des autorisations par l’ARPT, explique partiellement le retard dans le déploiement de la 3G en Algérie. L’ARPT est appelée à ouvrir une enquête pour vérifier la présence ou non d’obstacles bureaucratiques au déploiement, et surtout de s’assurer que les opérateurs mettent en œuvre tous les moyens nécessaires à atteindre leurs obligations. En clair, les techniciens du régulateur doivent régulièrement compter le nombre de stations 3G greffées aux réseaux 2G des opérateurs et mesurer le rythme de leur mise en service.
Pour ce qui est de la qualité de service des opérateurs 3G déjà opérationnels, elle a atteint des niveaux critiques. A peine les premiers mobinautes commencent-ils à goûter aux plaisirs des connexions rapides de la 3G++, que les opérateurs revoient déjà leurs stratégies de dimensionnement des sous-systèmes radio de leurs réseaux 3G. En clair, dans des zones urbaines à forte densité de population (entre 150.000 et 600.000 habitants), lors d’un téléchargement d’un fichier, nous avons relevé, aux heures pleines, des valeurs de débits réels bien loin de ce qui était espéré, variant de 500 Kbit/s à 1,6 Mbit/s. Alors dans la 3G++, lorsque les réseaux sont bien dimensionnés, ils sont capables de faire beaucoup mieux. Les débits data ne devraient pas descendre plus bas que 7 Mbit/s. Ces chiffres révèlent qu’il y a encore du chemin à faire pour atteindre des topologies et des couvertures performantes. Aussi, les débits mesurés montrent clairement que le taux d’usage des réseaux 3G est très fort par rapport au taux de couverture. Le régulateur devra ainsi agir pour lever les obstacles à l’accroissement de la couverture radio notamment dans les zones privilégiées par les abonnés, et contrôler le respect, par les opérateurs 3G opérationnels, du « ratio » entre les charges cellulaires des stations BTS et le nombre de cartes USIM activées.
Respect des normes de l’UIT
En fait, dans les réseaux cellulaires de l’UMTS (3G), le lien entre l’abonné et la cellule est beaucoup plus important que dans les réseaux GSM (2G). Techniquement, la cellule est une surface géographique couverte par une ou plusieurs stations BTS sur laquelle il y a la disponibilité d’un canal de transmission data, constitué d’une voie radio électrique caractérisée par une fréquence donnée ou un couple de fréquences données, selon les services assurés. Cette cellule dispose d’une charge maximale. Le nombre d’utilisateurs actifs ne doit pas dépasser, en moyenne, les 250 usagers pour une cellule 3G, dont le rayon varie de 700 mètres à 5 Km pour l’UMTS. C’est pourquoi, un coefficient (ratio) entre la disponibilité des canaux de communications aux mobiles et le nombre d’abonnés doit être fixé par l’ARPT. Ce ratio sert à contrôler la qualité de service du flux des données ou de la voix transportées par chaque opérateur. En se basant sur ces règles universelles de régulation, nous pouvons ainsi conclure que la 3G++, telle que déployée en Algérie, ne répond pas entièrement aux caractéristiques définies par les organismes de normalisation, tels que l’Union Internationale des Télécommunications (UIT). Il serait plus juste de parler de « 3G low cost » plutôt que de la 3G++ au sens universel du terme. D’ailleurs, il faut s’attendre à un nombre d’abonnés très bas par rapport aux estimations attendues, et à un mécontentement généralisé des usagers si la qualité des réseaux ne s’améliore pas. Parmi les lectures expliquant cette situation, certains estiment que les opérateurs cherchent à décourager la consommation data pour éviter de payer la facture « salée » de la bande passante internationale, et maintenir les revenus voix, issus des réseaux 2G, à un niveau record. Si cette hypothèse s’avère juste, quelle est l’entité qui osera s’attaquer aux opérateurs ?