Noureddine Boutarfa était attendu au salon des énergies renouvelables, qui s’est tenu à Oran. Il n’a annoncé aucune décision majeure, renforçant le scepticisme des opérateurs.
Le ministre de l’Energie, M. Noureddine Boutarfa, évoque, du bout des lèvres, un virage vers les énergies renouvelables. Il le fait toutefois de manière très prudente, sans réelle conviction, se contentant d’annonces, comme ses prédécesseurs. A peine succombe-t-il à l’effet de mode, sans arriver à imposer une démarche novatrice susceptible d’impulser une véritable dynamique au secteur.
Au 7ème salon des énergies renouvelables, qui s’est tenu du 24 au 26 octobre à Oran, M. Boutarfa a affiché des «objectifs ambitieux et prometteurs». Selon lui, l’Algérie produira 4.500 mégawatts d’énergie à partie de sources renouvelables d’ici 2020, et atteindra le cap de 45 à 51 térawatts à l’horizon 2030.
Pour l’année 2016, six stations, dont la production viendra s’ajouter aux 195 mégawatts déjà opérationnels, entreront en production dans les prochaines semaines, a-t-il annoncé. Mais cette production demeure marginale, au regard des grands objectifs fixés.
Stratégie à deux composantes
Et c’est sur ce terrain que M. Boutarfa piétine. Face à un secteur difficile à lancer, en raison des incertitudes réglementaires et financières, le ministre de l’Energie a encore compliqué la donne, en conditionnant la participation à des appels d’offre pour produire de l’énergie renouvelable à la nécessité d’investir dans le secteur industriel.
Pour lui, la démarche à envisager sera «une stratégie à deux composantes, industrielle et énergétique». Dans cette logique, il est hors de question de se lancer dans la production d’électricité solaire sans produire toute l’infrastructure qui va avec. M. Bouterfa ne veut pas seulement des énergies renouvelables, il affirme aussi travailler pour « l’émergence d’une industrie nationale du renouvelable ».
Les garanties sont acquises, dit-il. En plus de l’aide de l’Etat, les investisseurs peuvent compter sur la garantie de l’achat de l’énergie produite. A cela, il ajoute le recours aux appels d’offre pour faire baisser le prix du kilowatt/h.
Les fabricants ne sont pas exploitants
Un appel d’offre pour la production de 4.000 mégawatts par an, réservé aux entreprises algériennes ou en partenariat, est « en voie de finalisation », a-t-il annoncé. Ce qui signifie que l’appel d’offre n’est pas encore prêt, malgré l’insistance du ministre, qui précise que cet appel d’offres est «conditionné à l’investissement industriel».
Comment lier, sur les plans technique et juridique, un appel d’offre pour la production d’électricité à un investissement pour fabriquer des éoliennes ? Difficile à expliquer. D’autant plus que les fabricants de panneaux solaires, les installateurs, les exploitants et les distributeurs d’électricité exercent des métiers totalement différents. Difficile de faire plus compliqué donc, au moment précisément où le prix de l’énergie conventionnelle reste au plus bas.
Seul point positif, M. Boutarfa s’est déclaré ouvert à des aides éventuelles en faveur de l’agriculture. Il n’a toutefois pas précisé les conditions et les modalités de cette aide, déjà annoncée mais toujours difficile à mettre en œuvre.
Scepticisme des opérateurs
Les représentants de firmes présentes au salon d’Oran sont restés sur leur faim. L’un d’eux se dit « même pas surpris » par «l’attentisme » et « les hésitations » du ministre de l’énergie. Il rappelle que M. Boutarfa ne s’est jamais montré enthousiaste pour les énergies renouvelables lorsqu’il était à la tête de Sonelgaz, et que son arrivée au ministère de l’énergie risque de figer encore davantage le secteur.
Pourtant, rappelle-t-il, il y a de vraies opportunités en Algérie. Mais celles-ci sont annihilées par le système des prix, qui rendent l’énergie traditionnelle imbattable, décourageant de fait tout recours au renouvelable. Car historiquement, le renouvelable, non compétitif pendant des décennies, s’est développé grâce à l’impulsion des pouvoirs publics.
Aujourd’hui, le renouvelable, c’est aussi des décisions, des procédures, des simplifications, des possibilités de revendre à un opérateur historique le surplus produit à un prix élevé. Nombreux sont les Algériens tentés d’installer des panneaux solaires pour éviter les coupures d’électricité.
Mais se brancher sur le réseau pour revendre à Sonelgaz le surplus éventuel relève d’un parcours impossible. Des employés de deux agences, à Alger et Blida, ont déclaré ne pas être au courant des procédures, s’il y en a.