Le patron du DRS, le général Mohamed Mediene, a-t-il jamais été l’omnipotent « Dieu de l’Algérie » comme l’a qualifié, il y a quelques mois, l’expert pétrolier algérien Hocine Malti ? D’ailleurs y a-t-il jamais eu un « rab dzayer » ?
Les convulsions du pouvoir algérien pour faire passer Bouteflika 4 ont laissé de grosses séquelles. La classe politique, les élites d’affaires, l’opinion publique, personne ne sait qui gouverne vraiment
l’Algérie. Déstabilisant. Un paradigme s’est écroulé. Rappelons-le. L’armée tient le pouvoir à travers son bras armé, le service d’intelligence – comme dit délicatement Abdelaziz Rahabi -. Le DRS (Département de Renseignement et de Sécurité) sélectionne le personnel politique et gère les carrières. Y compris celle du président de la république. Cette construction, vraie ou fausse, a permis de prêter une rationalité au système durant deux décennies. En gros, depuis le départ à la retraite du général Khaled Nezzar (1994) après celle du colonel Chadli Bendjedid (1992). En attaquant frontalement, comme personne avant dans l’establishment, le général Mohamed Mediene, dit Toufik, patron du DRS, Amar Saadani, le secrétaire général du parti FLN a rompu les fils de cette Raison. Les
événements qui ont succédé à sa « sortie culte » sur TSA, ont aggravé le trouble.
L’ANP n’a pas déposé plainte, comme se sont empressés de l’écrire quelques confrères. Et les opposants à Amar Saadani n’ont pas obtenu d’autorisation pour tenir un comité central pour le destituer. Bref, le puissant patron du DRS n’a pas pu sévir contre un personnage politique pourtant précaire et lesté de casseroles. Le modèle de pouvoir a donc bien changé. Mais peut être pas tant que cela. Après tout si ce n’est pas le DRS qui décide dans l’armée, mais tout simplement son chef d’État-major, nous serions toujours dans une variante militaro-militaire du modèle mis à mal par les éruptions d’avant le 4ème mandat. Mais personne ne veut croire une seconde que le général-major Gaïd Salah est le nouveau « Rab Edzaïr » pour emprunter de chez Hocine Malti la formule qui a fait flores. Et on le comprend.
La carrière du chef d’État-major, vice-ministre de la Défense doit tout au président Bouteflika. Inconsistant. Mais alors faut-il se réduire à l’idée que le vrai patron de l’Algérie est tout simplement son président de la république. Là, ce sont les images qui deviennent ravageuses. Elles ne collent pas avec l’omnipotence déiforme. Dieu aphone et en chaise roulante? Même pour le Dieu au rabais d’un pays « low-cost », il y a une limite à la flexibilité de l’imaginaire. Un chef d’entreprise qui compte à Alger affirme que le nouveau Rab Dzayer est tout simplement Ali Haddad des établissements éponymes. Il a tout misé sur Bouteflika 4 et déciderait désormais de vie ou de mort dans le business de ceux qui ne l’ont pas suivi dans son engagement. Comme le général Toufik de sa « meilleure période ». Difficile à croire. Même si la discrétion du personnage sied bien au rôle encombrant que lui prête son collègue. Il ne se montre d’ailleurs même plus au public de l’USMA, le club de football dont il est propriétaire et qui vient de célébrer un nouveau titre de champion. Vrai que les puissances d’argent pèsent de plus en plus lourd dans les choix politiques du pays. Mais aucun oligarque en cours de constitution n’est encore suffisamment puissant pour faire et défaire l’Algérie du pouvoir.
Fausse piste. Général Toufik, Général Gaïd Salah, président Bouteflika, Ali Haddad, personne ne tient le casting divin. Il n’y a donc plus de Rab Dzayer. Mais peut être que l’expert pétrolier « dissident », Hocine Malti, s’est-il tout simplement trompé. Le général Toufik n’était déjà pas Rab Dzayer. Et ne l’a jamais été. Mais comment donc le système a-t-il réussi à le faire croire aussi longtemps en maintenant, petits et grands, en posture d’obéissance? Les voies du ciel sont impénétrables.