La valeur du dinar algérien est corrélé à 70% au cours des hydrocarbures ainsi que le pouvoir d’achat des Algériens et représentant en réalité plus de 70% des recettes fiscales car les importations de biens taxées le sont grâce aux des hydrocarbures. Cette baisse des recettes de Sonatrach (97/98% des exportations du pays) accentue le dérapage officiel du dinar avec un écart plus important du cours sur le marché parallèle ayant dépassé la barre de 160 dinars un euro.
Les réserves de change, produit de la rente et non du travail, soutiennent le cours du dinar, permettant également l’attrait de l’investissement, sinon un euro s’échangerait à 300/400 dinars et aucun investisseur étranger ne viendrait. Ce dérapage gonfle artificiellement le fonds de régulation des recettes, accroît la fiscalité hydrocarbures directement et indirectement et voile l’importance du déficit budgétaire. Exemple j’achète un produit à l’étranger de 100 dinars un euro. Si je dérape le dinar de 20% le prix achat coûtera 120 dinars au port Algérie, auquel j’applique les taxes douanières d’environ 20% donnant un produit sortie port de 144 dinars. A cela s’ajoute le coût sortie transport et la marge du détaillant avant d’arriver au consommateur. Comme les hydrocarbures représentent 97/ 98% des exportations et important 70% des besoins des ménages et des entreprises publiques et privées dont le taux d’intégration ne dépasse pas 15%, le dérapage du dinar accentue le processus inflationniste. Comme les taux d’intérêts des banques sont fonction du taux d’inflation, il faudrait alors augmenter leur taux d’intérêt freinant les investissements ou les recapitaliser ce qui serait difficile en cas de chute du cours des hydrocarbures. Il en est de même des subventions généralisées et sans ciblage, l’Etat subventionnant les produits de première nécessité, (60 milliards de dollars entre subventions et transferts sociaux soit 28% du produit intérieur brut), tous les produits non subventionnés devraient connaitre une hausse des prix.
Rappelons que la sortie de devises a été en 2013 de 55 milliards de dollars de biens, plus de 12 milliards de dollars d’importation de services, soit 67 milliards de dollars. Un montant auquel il faut ajouter 5 à 7 milliards de dollars de transferts légaux de capitaux des sociétés étrangères soit 72 à 74 milliards de dollars. La loi de finances 2015 prévoit 60 milliards de dollars d’importations de biens ce qui nous donnerait 80 milliards de dollars de sorties de devises. Or Sonatrach a eu une recette de 73 milliards de dollars entre 2010/2011, 63 milliards de dollars en 2013 et certainement comme je l’ai annoncé depuis plusieurs mois entre 55/56 milliards de dollars fin 2014 et non 60 milliards de dollars comme annoncé par certains responsables. Avec un cours moyen de 70 dollars le baril, les recettes de Sonatrach seront inférieures à 50 milliards de dollars et pour 60 dollars approcheront les 40 milliards de dollars. Or, la loi de finances prévisionnelle 2015 fonctionne sur un cours supérieur à 125 dollars. Encore qu’il faille tenir compte des restes à réaliser du fait du divorce entre les objectifs et les moyens de réalisation qui a avec une dette faible et les réserves de change actuelle, sans compter l’importance de l’épargne notamment au niveau de la sphère informelle (plus de 62 milliards de dollars voir notre étude Institut IFRI décembre 2013 Paris France) qu’il s’agit de transformer en richesses réelles, constituent une soupape de sécurité mais uniquement pour le court terme.
En cas de persistance de la chute du cours des hydrocarbures, il sera impossible de continuer à subventionner et à verser des salaires sans contreparties productives. D’où l’importance, avec le dépérissement du tissu productif ( le secteur industriel en déclin représentant moins de 5% du PIB), de la rationalisation des choix budgétaires non aveugles, devant protéger les e catégories sociales les pus vulnérables où l’inflation permet une concentration du revenu au profit des revenus variables ( la rente), et de ne plus dépenser sans compter et surtout d’élever la production et la productivité globale reposant sur des segments compétitifs en termes de coûts /qualité au sein des filières internationalisées. Il y a lieu impérativement de repenser à une nouvelle orientation de la politique socio-économique qui jusqu’à présent a reposé essentiellement sur le développent des infrastructures, avec des surcoûts exorbitants, qui ne sont qu’un moyen. La création de la richesse durable et permettant des emplois productifs et non des emplois rentes, relève de l’entreprise qu’elle soit publique (mais compétitive les assainissements répétées ayant coûté au trésor entre 1972-2013 plus de 60 milliards de dollars au trésor) ou privée locale ou internationale se fondant sur le transfert managérial et technologique (co-partenariat) . Mais cela suppose de revaloriser l’économie de la connaissance et une autre gouvernance.
(*) Abderrahmane MEBTOUL (docteur d’Etat-1974) -Professeur des Universités, Expert International en management stratégique