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Algérie – Nabni s’alarme de la persistance de l’immobilisme et appelle «à changer de voie» (communiqué intégral)

Par Maghreb Émergent
avril 8, 2014
Algérie – Nabni s’alarme de la persistance de l’immobilisme et appelle «à changer de voie» (communiqué intégral)

Sans déroger à son choix de ne pas s’impliquer dans la présidentielle et à demeurer dans son posture non-partisane, le think-tank informel Nabni appelle avec force à « changer de voie pour garantir la stabilité du pays et l’engager dans un projet de développement ». A l’encontre du discours en vogue, Nabni affirme que la stabilité est dans le changement et non dans l’immobilisme. Il s’inquiète, une fois de plus, d’un risque de dégradation de la situation dans le pays si l’immobilisme continue de prévaloir. C’est une nouvelle alerte «politique » que Nabni lance avec gravité.Voici dans son intégralité, son communiqué « Appel à changer de voie ». 

Appel à changer de voie pour garantir la stabilité du pays et l’engager dans un projet de développement

 Alger, le 8 avril 2014 – L’Algérie traverse une nouvelle période critique de son Histoire.   Le contexte actuel peut offrir une opportunité historique d’impulser l’émergence d’une nouvelle ère. Ce contexte peut aussi conduire le pays à s’enfoncer davantage dans une crise non seulement politique, mais également économique et sociale, si l’immobilisme continue de prévaloir face aux problèmes de fond auxquels nous faisons face. Le collectif citoyen NABNI demeure fidèle à sa posture non-partisane et à son engagement de ne soutenir ni candidat, ni consigne de vote ou d’abstention durant l’élection présidentielle. NABNI a néanmoins le devoir d’alerter l’opinion publique nationale sur l’enjeu crucial de cette période et de contribuer au débat public en rappelant notre position sur le changement de voie que nous jugeons nécessaire et urgent pour éviter au pays les dangers qui le guettent.

L’Algérie est à la croisée des chemins. Le moment est venu de s’atteler à un changement profond de la gouvernance publique et du fonctionnement des institutions. La mauvaise gouvernance, corollaire de l’affaiblissement des institutions, est en effet à l’origine de nos échecs passés et de la fracture qui s’est installée entre l’Etat et la société. Absence de redevabilité et manque de transparence de l’Etat sont les causes profondes qui minent la confiance des citoyens à l’égard des institutions. Ce sont les mêmes causes qui sont à l’origine de la mauvaise gestion de nos ressources, et de l’échec patent à sortir de l’économie de rente. L’absence de réformes sérieuses de la gouvernance hypothèque aujourd’hui l’avenir du pays.

 Depuis la publication du rapport Cinquante chantiers de rupture pour bâtir l’Algérie de 2020, NABNI n’a cessé d’alerter l’opinion publique sur l’urgence et l’ampleur des ruptures à apporter dans le fonctionnement des institutions et la conduite des affaires de l’Etat dans tous les domaines, ainsi que dans sa relation au citoyen. Il est à présent urgent que nous prenions collectivement conscience des risques que fait courir l’inaction en matière de réforme de la gouvernance et du besoin de s’engager dans un changement ambitieux et serein.

 Ce changement, nous l’avons décrit dans le Manifeste pour une voie nouvelle, rendu public le 22 février 2014 sous forme d’un Appel pour l’édification d’un Etat de DROITS qui soit :

 Détaché de la rente : afin de rompre avec les dérives induites par cette richesse éphémère.

Redevable envers la société : pour que l’Etat rende compte de ses actions aux citoyens.

Ouvert au changement : un Etat moderne, qui ne soit plus figé dans des schémas dépassés.

Inclusif dans son fonctionnement : pour un Etat qui écoute et implique ses citoyens.

Transparent dans ses actions : afin que cesse l’opacité qui entoure l’Etat et la chose publique.

Stratège dans ses ambitions : pour un Etat porteur d’une vision ambitieuse et volontariste.

 La construction de cet Etat de DROITS exige la fin des règles informelles gouvernant les institutions, ainsi que la mise en place d’un Etat reposant sur le droit, et garantissant l’égalité des citoyens devant la loi. Indépendance de la justice, respects des libertés fondamentales, qu’elles soient individuelles ou publiques, et équilibre des pouvoirs sont des conditions fondamentales pour la construction de l’Etat de DROITS que nous appelons de nos vœux.

 Retarder l’avènement de cette nouvelle ère et choisir la continuité dans le fonctionnement des institutions et de l’Etat, c’est choisir de perpétuer une voie risquée et sans issue. Il en va de la stabilité politique et économique du pays, de sa cohésion sociale et de notre avenir commun.

 NABNI lance aujourd’hui un Appel à changer de voie pour garantir la stabilité du pays et l’engager dans un projet de développement.

 Notre devoir est d’alerter l’opinion publique sur le fait que les moyens financiers dont a disposé l’Etat ces dernières années, grâce aux recettes d’hydrocarbures, vont probablement se réduire drastiquement. Ces recettes ont jusque-là permis de compenser en partie les lacunes de l’Etat par des dépenses considérables et certaines réalisations indéniables. Mais elles vont tôt ou tard diminuer alors que notre pays est plus que jamais dépendant de son sous-sol.

 Préparer l’Algérie à cette inévitable échéance requiert un profond changement de voie. Ce changement est garant de notre stabilité. Le retarder nous expose au risque d’instabilité.

 Le moment est venu d’élever au niveau de priorité nationale l’objectif de réduire notre dépendance à une rente dont l’accès sans contrôle mine nos institutions et entretient des politiques inefficaces. Prémunir l’Etat des effets néfastes de la rente est essentiel pour pouvoir utiliser ce qui nous en reste au bénéfice d’un réel projet de développement ainsi qu’à celui des générations futures. Ceci ne pourra se faire sans ce changement de voie auquel nous aspirons.

 Garantir la stabilité du pays exige de changer de cap rapidement. Perpétuer l’immobilisme et la voie actuelle l’expose au risque de difficultés majeures et aux dangers de l’instabilité.

 Il s’agit, pour notre pays, de retrouver l’ambition de développement et l’audace perdues ; pour l’Etat, de recouvrer sa crédibilité et de bâtir des institutions fortes ; pour la démocratie, de s’enraciner et de s’épanouir.

Il s’agit de rétablir la confiance rompue entre l’Etat et le citoyen. De renforcer la cohésion sociale et la citoyenneté afin de bâtir l’avenir sur un nouvel élan, sur de nouvelles fondations. Impulser ce renouveau requiert un sursaut historique, soutenu par un consensus national.

Ce changement ne sera possible que si le Président de la République qui le portera bénéficie d’une légitimité populaire sans faille. Ce dernier, autant que l’Exécutif qu’il dirigera, devra incarner cette ambition et cette audace de bâtir une Algérie nouvelle. Il devra être armé de cette capacité d’écoute, d’ouverture, de conviction et de rassemblement qu’exige ce projet national. Une responsabilité historique lui incombera. Une tâche considérable l’attend.

***

Il reste très peu de temps pour engager ce changement salutaire pour notre stabilité future. Les prochaines années seront décisives pour réussir ce virage de grande ampleur qui exige l’engagement de toutes les forces constructives du pays. La société civile devra en particulier s’affirmer davantage comme acteur des politiques publiques. Tout comme le citoyen, dont l’implication est cruciale car, sans lui, aucun changement profond n’est à espérer.

Dans cette perspective et au vu du contexte actuel, NABNI s’engage à continuer à porter un regard neuf, constructif, critique et indépendant sur les enjeux auxquels fait face notre pays. Le collectif continuera à proposer des solutions sur une base participative et citoyenne.

Afin d’alimenter un débat national sur l’avenir du pays et de clarifier la vision de NABNI portant sur le changement de gouvernance auquel nous appelons, nous publierons prochainement six textes décrivant chacun des six attributs de l’Etat de DROITS que nous jugeons urgent et indispensable de mettre en place pour faire face aux défis actuels et futurs.

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