L’année économique et sociale qui s’est ouverte ce 21 septembre sera planétairement, marquée par la bataille du climat, Bientôt la mère de toutes les batailles : Les enjeux de business qui lui sont directement connectés sont monstrueux. A regrouper en deux grands camps, celui de l’énergie carbonée et celui de l’énergie sans carbone. Un moment déstabilisé par la montée des effets du réchauffement planétaire, le lobby mondial de la production carbonée a redressé spectaculairement la situation. Grâce à la crise financière de 2007-2009. Le mot d’ordre est simple. Pour faire revenir la croissance et l’emploi en zone OCDE, il ne faut surtout pas en tuer le moteur. L’énergie polluante. La transition énergétique qui contiendra l’effet de serre en 2050 à «seulement» 2 degrés de plus est nécessaire. Mais attendra. Le calendrier de la transition énergétique est donc le plus grand enjeu de la bataille.
Une marche mondiale pour le climat a eu lieu ce premier jour de l’automne, tandis que le Secrétaire général des Nations unies réunit les chefs d’Etat de la planète sur le climat en marge de la session ordinaire des Nations unies à New York. Les influenceurs sont en ordre de combat. Deux études ont été publiées ces derniers jours servant – objectivement – l’un des deux camps. L’une publiée lundi dans les comptes rendus de l’Académie américaine des sciences (PNAS), conclu sur la base de l’observation de cent puits en Pennsylvanie et au Texas, que la fracturation hydraulique n’est pas responsable de la pollution des nappes aquifères dans l’industrie du gaz de schiste. Ce sont des défauts dans la construction des puits qui en rendraient l’étanchéité incomplète.
Une conclusion – apparemment sérieuse – qui absout le second âge pétrolier américain d’une de ses deux damnations : l’empoisonnement de l’eau. Mais qu’en est-il de la seconde ? Les émissions de gaz à effet de serre que dope le grand retour de la production américaine d’hydrocarbures ? La seconde étude commandée par 7 pays tord le cou à l’argument majeur du camp du carbone : «Lutte contre le changement climatique et croissance économique peuvent aller de pair», a déclaré cette semaine le célèbre économiste, Sir Nicolas Stern, chargé avec l’ancien président mexicain Felipe Calderon de coordonner ce rapport : «Une meilleure croissance pour un meilleur climat».
La première mesure que préconise le rapport Stern-Calderon est «d’intégrer le climat dans toutes les décisions économiques publiques et privées». Tout de suite : Cela évitera de payer plus cher les effets du réchauffement plus tard. Jusqu’à 10% du PIB du monde si les bonnes mesures ne sont pas engagées à temps. La production mondiale va augmenter de 50% les 15 prochaines années. 90 000 milliards de dollars d’investissements nécessaires. Gigantesque. Mais 4000 milliards de dollars supplémentaires, 5 % seulement de plus, selon la commission Stern, permettraient d’éviter le krach économique pour cause de réchauffement qui attend les activités humaines sur la terre au-delà de 2030. Pour cela, il faut clairement accélérer la sortie des énergies fossiles.
En commençant, c’est la 3e recommandation de la commission Stern-Calderon, par éliminer les subventions aux énergies fossiles. C’est-à-dire prendre le contrepied de la tendance actuelle. A New York, les chefs d’Etat du monde se réunissent dans un pays qui a, secrètement, décidé de s’émanciper des importations de gaz et de pétrole après le choc du 11 septembre 2001. La production américaine de pétrole va rejoindre sous peu, avec près de 8 milliards de barils par jour, celle du peak oil US de 1970. Grâce au boom de l’industrie des hydrocarbures non conventionnels. Une activité soutenue fiscalement par Washington.
L’Algérie de Bouteflilka-Yousfi n’a pas choisi de camp dans la bataille mondiale du climat : Elle est naturellement dans le camp du carbone. Et ne songe pas à en sortir. Réflexe de court terme. Comment demander à deux septuagénaires dont toute la carrière politique a oscillé autour du prix du baril à penser un avenir différent ? Surtout pas au moment où le shale oil – pétrole de schiste dont dispose aussi l’Algérie – redonne à la production mondiale des allures de nouvelle aube pour les énergies fossiles. La tendance de la conférence mondiale du climat qui se tiendra en 2015 à Paris et qui commence cette semaine à New York sera de faire payer les pays qui s’engraissent sur les bouffées de chaleur de la Terre. L’Algérie en fait partie. Le modèle énergétique carboné coûtera de plus en plus cher à ceux qui y colleront. Car sa nuisance va aller en s’aggravant.
Le mois d’août dernier a été le plus chaud aux Etats-Unis depuis… 1880. Les canicules de septembre ont fait fermer les écoles à Tunis ce vendredi. La prolongation de l’énergie fossile nécessite des investissements de plus en plus lourds pour aller chercher pétrole et gaz de plus en plus loin. Une course de plus en plus insensée. Sauf pour ceux qui en vivent. Pourtant, cette semaine apporte la nouvelle la plus chargée d’espérance pour l’avenir. Sonelgaz va réaliser une dorsale électrique de grande capacité entre le nord et le sud de l’Algérie. Elle servira demain à transporter l’électricité solaire que le Sahara produira pour l’Algérie et l’Europe. C’est écrit dans Desertec. Et les prophètes, tout le monde le sait, viennent du désert.