La semaine économique commentée par El Kadi Ihsane.
Le seuil de six semaines est franchit en 2015 et la vision se précise par rapport à la fin de l’année dernière. L’Arabie Saoudite ne bluffe pas. C’était encore un « souhait algérien » il y ‘ a presque deux mois aux lendemains d’une réunion calamiteuse de l’OPEP à Vienne qui avait maintenu intact le plafond de production de brut du cartel. Un doute subsiste encore aujourd’hui sur la motivation de Riad dans son refus d’agir sur sa production pour faire remonter les cours du brut. Il devient secondaire. La tendance est là. La séquence historique longue (2004-2044) du pétrole cher va s’interrompre durant quelques années. Elle reprendra lorsque les autres sources d’énergie concurrentes, y compris les hydrocarbures non conventionnels, auront subies des dommages suffisants dans leur développement pour relancer le recours aux hydrocarbures conventionnels dans les mix énergétiques dominants. La durée de cette interruption – tout le monde s’accorde à reconnaitre que le pétrole à plus de 140 dollars reviendra à nouveau – est une incertitude relative. Elle est aujourd’hui suffisamment cernée pour justifier les deux scénarios clés qui commandent « l’adaptation féconde ». Le premier est celui de la transition énergétique, le second celui de la diversification de l’offre domestique. Personne dans le gouvernement algérien ne travaille sérieusement sur ces deux scénarios. Le ministre de l’énergie Youcef Yousfi parait totalement perdu dans un arbitrage qu’il a vendu seul aux Algériens. Celui de faire du gaz de schiste la filière prioritaire de la transition énergétique du pays. Tewfik Hasni, le père de la 1ere centrale électrique hybride gaz-solaire (Hassi R’mel) est venu rappeler cette semaine qu’en Algérie, le prix moyen du kilowatt heure d’origine solaire-thermique (CSP) sera moins cher sur la durée des 25 ans que celui du kilowatt-heure d’origine gaz de schiste. Or dans les prochaines 25 années, le marché énergétique régional (Algérie-Europe) sera d’abord un marché électrique. L’autre option forte de la transition énergétique algérienne est bien sur l’amélioration de l’efficacité énergétique désastreuse du pays. L’Algérie gaspille ses ressources, 85e position sur 124 dans le monde selon le forum économique mondiale (FEM 2014). Youcef Yousfi est démissionnaire sur ce front. Faute d’agenda sérieux pour un nouveau mix énergétique domestique, il est encore et toujours dans le court terme politique. A courir les capitales des pays producteurs de pétrole hors OPEP (Gabon, Guinée équatoriale, Congo, Kazakhstan etc.), un courrier de Bouteflika en main, invitant à la discipline des producteurs de pétrole pour en redresser les cours.
Si la transition énergétique n’est pas prise en charge par le gouvernement, sa conscience de l’urgence de la diversification de l’offre domestique est suspecte. D’où l’absence la aussi d’un scénario sérieux. Les iraniens ont profité des sanctions économiques de ces dernières années pour se désintoxiquer des importations massives. Un choc anti-importation ne génère pas automatiquement un contre-choc production et exportation domestique. Si cela était vrai l’Algérie serait devenue un mini-dragon après la purge des années FMI (1993-1998). Il faudra donc produire les bonnes incitations pour produire et exporter algérien. En février 2015 des produits de l’artisanat aurésien sont écoulés à Batna avec la mention « made In China ». Des importateurs ont donc choisi de les faire copier dans l’atelier du monde, parce que cela rapporte mieux. En dépit de tout. Des frais d’approche et de suivi, des coûts de transport, des frais de dédouanement, du prix bas de l’énergie en Algérie, de la proximité de la main d’œuvre. La Chine bat l’Algérie à Arris sur une broche en argent de dessin local. Le désarmement est absolu. Comment inverser le mouvement ? La tendance 2015 se précise. Nous savons maintenant que les revenus extérieurs de l’Algérie vont être sans doute inférieurs à 40 milliards de dollars sur l’année. Nous savons aussi que le trio Bouteflika-Sellal-Yousfi ne pense qu’à prolonger le temps du pétrole cher. Seul contre tous.
De quoi la « réussite » est elle le nom ? A l’échelle d’un pays, les institutions internationales calculent le PIB par habitant et la cohorte des indicateurs de développement social, pour situer le succès d’un pays dans son développement. Fikra, la conférence a choisit le thème de la « réussite » pour sa seconde édition, évite bien sur de parler des expériences pays, plus délicates à gérer politiquement que celle des individus. Mais évaluons donc le concept de « réussite » pour l’Algérie sur les dernières 48 heures. Cela tombe bien, c’était un week-end, indice synthétique de la qualité de vie, par l’utilisation du temps libre. Alger-Batna en 7 heures 30 le jeudi après les heures de travail. Motif, pénurie de gasoil sur tout l’est algérien. Depuis une semaine. Bouchon d’une heure sur le tronçon Lakhdaria-Tunnel de Djebahia. Motif, « ETRHB travaille pour vous ». Depuis 3 ans. Nombre de touristes étrangers au balcon de Ghoufi, nul. 04 touristes étrangers à Timgad, plus grand complet site romain hors l’Italie. Arrestation et mise au secret de militants de droits de l’homme soutenant les militants détenus du comité des chômeurs de Laghouat. Motif, pas de réponse économique au chômage. Interdiction de la réunion de la CNLTD. Motif, pas de réponse politique à l’opposition. Attentat terroriste contre l’ANP à Zbarbar. Motif, pas de fin au terrorisme résiduel. L’Algérie a fait de grand progrès depuis quinze ans. A-t-elle fondamentalement changé ? Les équipements nouveaux sont déjà délabrés, les pénuries de produits de base sont toujours là. Le pays est toujours aussi fermé au reste du monde, et l’insécurité terroriste n’y a toujours pas disparu. Une « évolution » toutefois, la contestation sociale rencontre une répression plus ferme et plus « barbouzarde ». La réussite c’est peut être cela. Reproduire l’ancien sans fin.