Le succès de la 3G, qui a réussi à capter environ 8,5 millions d’abonnés après environ une année de son lancement, cache mal le retard numérique de l’Algérie. Le faible taux de pénétration de l’Internet ADSL, mais surtout la timide adoption des e-services dans les différentes branches économiques et de l’administration interpellent Nabni. Le think-tank algérien plaide pour une transformation numérique au titre d’ »une urgence nationale ».
Le collectif citoyen N.A.B.N.I (Notre Algérie Bâtie sur de Nouvelles Idées) a publié de nouvelles propositions de réformes concernant le secteur des TIC. Dans une feuille de route de trois années, intitulée “D.I.G.I.T Algérie”, le think-tank dresse un constat peu réjouissant de l’évolution du numérique en Algérie qui accuse un grand retard. Nabni prône un ensemble de mesures pour enclencher une « transformation numérique » qu’il classe au titre d’ »urgence nationale », un « impératif pour une mue vers une économie moderne ».
Nabni ne plaide pas pour une simple « construction d’infrastructure de réseaux et d’équipements ». Il mise sur un projet de numérisation beaucoup plus ambitieux, avec pour but d’aboutir à un véritable écosystème des TIC en Algérie. Ce laboratoire d’idées s’est effectivement fixé pour objectif de « bâtir les fondements nécessaires à l’essor du numérique » en Algérie, et de développer une « filière industrielle des nouvelles technologies ». Pour ce faire, Nabni a concentré l’énoncé des réformes proposés dans cinq axes, touchant au : « Développement des usages », à l’Innovation, à la Gouvernance du secteur des TIC, à ses infrastructures, sans omettre les Talents (D.I.G.I.T).
L’Algérie aura-t-elle enfin son écosystème TIC ?
Le collectif Nabni revient dans ses propositions sur l’inévitable question du paiement en ligne. Malgré la volonté exprimée par la ministre des PTIC, Houda-Imane Ferouan, de contourner le e-paiement par le paiement par mobile, Nabni appelle à instaurer d’abord un cadre réglementaire permettant le développement de ce genre de services numériques. Si les membres de Nabni reconnaissent la responsabilité et le rôle du secteur privé dans le développement de la branche e-commerce, ils insistent sur la nécessité du cadre réglementaire « clarifiant les rôles et les responsabilités des banques, des opérateurs et des intermédiaires pour instaurer la confiance et favoriser l’essor de cette technologie ».
Ingrédient incontournable de cette transformation numérique, les structures d’encadrement et d’accélération de talents manquent à l’appel. « De nombreuses start-ups émergent mais peinent à décoller par manque de structures d’encadrement et d’accélération », déplore le think-tank. Celui-ci estime que le ministère des PTIC devrait instituer un programme national de financement et de coaching, dont pourraient profiter ces mêmes PME. Une initiative à laquelle pourraient prendre part les « grands acteurs du secteur des TIC », notamment les opérateurs télécoms, les groupes industriels algériens et les acteurs internationaux, sans omettre les dispositifs de soutiens à l’emploi.
Dans son volet sur la « Gouvernance » du secteur numérique de son rapport, Nabni a appelé l’Autorité de Régulation de la Poste et des Télécommunications (ARPT) ainsi que le MPTIC à l’ouverture de la téléphonie fixe à la concurrence. Une ouverture qui devrait accélérer le développement des réseaux haut débit, estime Nabni, qui déplore que la question soit maintes fois évoquées sans jamais se concrétiser. A ce sujet, le collectif pointe également du doigt la confusion qui règne dans le rôle et les responsabilités du trio : ARPT, MPTIC et Conseil de la concurrence.
Le défi de la formation
Nabni ne manque pas non plus de souligner l’importance d’Algérie Télécom (AT) dans le développement du réseau Internet. L’opérateur historique, qui détient la plus grande infrastructure télécom et Internet du pays, doit être renforcé à même de poursuivre son déploiement auprès des 8 ou 9 millions de logements et entreprises, estiment les membres experts de ce collectif. Dans sa feuille de route « D.I.G.IT Algérie », le think-tank Nabni suggère le renforcement d’AT sur trois volets, touchant à la proximité client, l’efficacité opérationnelle et surtout la « modernisation de son mode de management avec de nouveaux talents internes ou externes à l’entreprise ».
A propos des talents, Nabni aborde aussi la formation. Le think-tank prône une fois de plus la création d’écoles dédiées aux TIC et au numérique, mais surtout d’inscrire les nouvelles technologies et de les vulgariser auprès des enfants. « Les nouvelles technologies deviennent une nouvelle langue, certains enfants sont exposés aux NTIC avant d’y être exposés dans le cadre de leur formation scolaire », estime Nabni dans sa feuille de route.
Il s’agira aussi de doter les universités, les grandes écoles et les instituts en équipements et formations TIC adéquates, notamment les plateformes d’apprentissage virtuelles (MOOC). De quoi « généraliser l’accès à ces outils à toutes les catégories de population », explique Nabni. Un « gros » chantier que les autorités ne sauraient mettre en œuvre sans la mise en place d’une unité de pilotage du plan digital de l’Algérie.