Dans une récente étude de la Banque mondiale sur l’Internet dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord (MENA), les pays du Maghreb ont été classés comme marchés «en phase d’émergence » en matière de haut débit (mobile et fixe). Alors que la plupart des marchés des pays du Golfe sont au stade de « croissance ».
Les pays où le haut débit est encore en phase d’émergence, sont ceux où il est encore « loin d’être abordable pour au moins 60% de la population », note la Banque Mondiale, précisant que « le prix du haut débit joue un rôle prépondérant en termes de pénétration ». Selon l’Union internationale des télécommunications (UIT), la pénétration du haut débit croit rapidement dès que les prix au détail chutent en-deçà de 3 à 5% du salaire mensuel moyen, niveau à partir duquel le haut débit devient abordable. Dans les pays de la région MENA, les prix du haut débit fixe représentent environ 3.6% du revenu mensuel moyen par habitant, alors que les prix du haut débit mobile se situent à 7.7%. Selon l’étude de la BM, l’Algérie, la Libye, le Maroc et la Tunisie ont atteint le niveau « qui rend possible le décollage rapide du haut débit ». Toutefois, ces pays n’ont pas réussi à s’appuyer sur les TIC dans leur processus de transformation économique et sociale. Alors qu’ils auraient « beaucoup à gagner en adoptant une approche concertée en matière de développement du haut débit ».
Des marchés insuffisamment développés
Pourtant les stratégies nationales haut débit existent dans la plus part des pays du Maghreb (à l’exception de la Libye, la Mauritanie ne figure pas dans l’étude). Mais, étant encore en phase d’émergence, ces marchés du haut débit sont insuffisamment développés. Le taux de pénétration du haut débit fixe est de 10,9 % au Maroc, 18,1 % en Algérie et 23,4 % en Tunisie. L’étude note que la faiblesse du taux de pénétration peut être attribuée à plusieurs facteurs, tels que le manque d’infrastructure, la faiblesse ou l’absence de concurrence et les prix élevés des services. Ce sont des aspects très importants. Ainsi, en Algérie, comme en Tunisie, le haut débit fixe présente des taux de pénétration à des prix relativement élevés. « Pour l’Algérie, cela s’explique par l’absence de haut débit mobile dans le pays (lancé à la mi-décembre 2013). En Tunisie, le développement du haut débit fixe à des prix élevés peut s’expliquer par la même raison, car les services 3G n’ont été introduits qu’assez récemment (2010) et que leur pénétration est encore relativement limitée », explique-t-on. En gros, les marchés du haut débit mobile ont connu un développement timide dans la région en raison soit d’un niveau de la concurrence insuffisant ou à cause des retards mis dans la mise aux enchères du spectre.
Monopole des opérateurs historiques pointé du doigt
Le retard pris dans la généralisation du haut débit s’explique en grande partie, selon l’étude, par la faiblesse des réseaux d’accès et un marché du haut débit mobile peu développé. L’étude note qu’un degré de concurrence insuffisant et une réglementation peu effective pour l’accès ouvert au réseau posent d’importantes contraintes à l’exploitation efficace de la connectivité, régionale et internationale. Ce qui se traduit, souligne le document, par des niveaux de prix élevés pour l’international au niveau de la région. Il pointe du doigt le monopole exercé par les opérateurs historiques sur l’accès à la connectivité par câble sous-marin international. Il est à noter qu’un seul câble à fibres optiques (Ibn Khaldoun) assure la connectivité à haut débit au niveau régional entre la Libye, la Tunisie, l’Algérie et le Maroc. Ce câble appartient aux opérateurs historiques et ce sont eux qui l’exploitent. L’étude de la Banque Mondiale souligne en outre le rôle de l’infrastructure dorsale nationale réalisée en technologie fibres pour le développement de l’accès haut débit. « En l’absence de tels réseaux dorsaux agrégeant le trafic de données en croissance constante, et réduisant par là même le coût moyen de l’acheminement du trafic, il est peu probable que les services haut débit soient commercialement viables ailleurs que dans les zones urbaines d’un pays donné ». Selon les auteurs du rapport, pour élargir les capacités de l’infrastructure dorsale nationale, il est nécessaire d’opérer le partage de l’infrastructure existante et d’en déployer de nouvelles.