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Les pays émergents investissent en force dans les terres arables africaines

Par Maghreb Émergent
novembre 20, 2014
Les pays émergents investissent en force dans les terres arables africaines

En dépit de ses richesses naturelles et humaines, l’Afrique compte le plus grand nombre de pauvres. Les gouvernants peuvent surmonter ce paradoxe par la prise de décisions audacieuses en matière de politiques foncières.

Les conclusions auxquelles sont parvenus les experts en foncier et en agronomie, réunis à Addis Abeba en Ethiopie du 9 au 14 novembre dernier, sont alarmantes. Elles suscitent de l’inquiétude quant à l’avenir de ce continent, dont les gouvernants consacrent plus 40 milliards de dollars par an en importation pour couvrir les besoins alimentaires de la population, alors qu’il recèle d’importantes terres arables.
Celles-ci connaissent, tient-on à rappeler, une ruée impressionnante d’investisseurs étrangers. En effet, « l’apparente multiplication d’achats fonciers dans ce continent par des entreprises et gouvernants étrangers destinés à des cultures vivrières, commerciales ou tournées vers l’exportation, provoque des inquiétude », souligne Roy Laishley dans son exposé « Main basse sur les terres africaines ». D’où la réaction de l’UE (l’Union Africaine) qui, à travers le consortium CUA-FAO-BAD (commission de l’Union africaine, organisation du fonds alimentaire et la banque africaine de développement), recommande aux gouvernants africains de prendre des décisions audacieuses lors des transactions foncières.
Eviter une nouvelle forme de colonisation
L’Afrique est la cible d’investisseurs étrangers parce qu’elle offre beaucoup de terres et une main d’œuvre bon marché, en sus d’un climat propice aux cultures. Mais cette « occupation » des terres ne doit pas être au détriment de la population. Raison pour laquelle d’ailleurs les recommandations de la rencontre sur les politiques foncières en Afrique suggèrent aux gouvernements d’adopter une approche stratégique. Celle-ci doit créer « un scenario gagnant-gagnant pour les communautés locales et les investisseurs étrangers ».
Inspirée de la proposition japonaise lors du sommet du G8 en 2009, l’UE recommande la mise en place d’un code de conduite qui encadrerait les procédures de transactions foncières. Elle avait exhorté les gouvernements à consacrer 10% de leurs dépenses à l’agriculture, mais peu d’entre eux ont atteint cet objectif. Les pays émergents (Inde, Afrique du Sud, Chine, Corée du Sud, Qatar et Arabie Saoudite), se sont accaparés de nombreuses superficies agricoles pour les affermer. Certains y voient en ces acquisitions étrangères des opportunités de développement et d’autres, et ils sont nombreux, y voient aussi une menace. Toutefois, « la sécurisation du foncier sous les différents régimes est recommandée pour éviter une nouvelle forme de colonisation ». Un principe auquel adhère la société civile africaine indignée par l’augmentation paradoxale du taux de chômage qui dépasse les 40%.

Protéger les catégories sociales vulnérables

Les recommandations établies à l’issue des travaux de la conférence sur les politiques foncières en Afrique plaident plutôt pour la protection à la fois de la population autochtone (contre leur spoliation) et l’environnement (contre sa dégradation). Parmi cette population locale, l’on cite notamment la catégorie sociale la plus vulnérable. Les travailleuses africaines de la terre affrontent les idées reçues par la tradition qui l’écartent de la sphère décisionnelle et de l’héritage. En effet, des systèmes de régime foncier coutumier des pays africains ne permettent pas aux femmes d’hériter des terres. La femme reste toujours une étrangère dans la famille de son mari. Et sa propre famille ne lui cède pas de terrain car elle va partir chez une famille étrangère. Un véritable casse tête auquel sont exposées les femmes africaines et il les rend vulnérable.
En Afrique subsaharienne par exemple, les femmes produisent jusqu’à 80% des denrées alimentaires destinées à la consommation des ménages et à la vente sur les marchés locaux. En dépit de cet effort, elles continuent à bénéficier d’un appui bien inférieur à celui des hommes. Bien qu’elles constituent une importante main d’œuvre agricole (60 à 80% au Nigéria), ce sont généralement les hommes qui prennent les décisions importantes concernant la gestion de l’exploitation. L’UA renforce son soutien indéfectible aux femmes agronomes et appelle les décideurs politiques des pays africains à renforcer les textes législatifs en matière de droit foncier, en introduisant des clauses sécurisant les acquisitions agricoles des femmes. Enfin, un agenda foncier est mis en œuvre pour la prochaine décennie mettant à contribution des décideurs politiques, des acteurs non étatiques, des chercheurs et universitaires, ainsi que les institutions continentales et internationales (BAD, CENUA et UA).

 

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