Des écoutes téléphoniques et électroniques ont permis de révéler un trafic de billets lors du Mondial 2014 au Brésil. L’implication d’un franco-algérien a été mise en évidence. Histoire d’une « guerre » secrète en marge du plus grand événement sportif de l’année.
Depuis le 12 juin dernier, jour du coup d’envoi du mondial 2014, le Brésil est devenu le pays où les télécommunications et le football se sont joints pour faire entrer la coupe du monde dans l’ère de l’hyper connectivité, et mettre en exécution le processus de surveillance électronique de masse. Les services de sécurités brésiliens ont pu, pour la première fois de l’histoire du pays, surveiller l’ensemble des connexions de masses des supporters, athlètes, personnel de la FIFA et des délégations étrangères. Ce mondial a été marqué par de nombreuses affaires de fraudes dont la plupart ont été résolues grâce à l’investigation électronique. Parmi ces affaires, une vente illégale de billets de différents matchs de la coupe du monde. Les écoutes électroniques enclenchées par la brigade spécialisée de la police fédérale brésilienne ont permis de découvrir l’implication des fédérations de football brésilienne, d’argentine et espagnole dans la constitution d’un réseau international de vente frauduleuse de billets pour la Coupe du monde. Ce réseau était dirigé par un Franco-Algérien, répondant au nom de Mohamadou Lamine Fofana, âgé de 57 ans, qui faisait l’objet d’une surveillance électronique depuis son arrivée au Brésil.
Selon le quotidien brésilien O Dia de Rio de Janeiro, la surveillance des 500.000 points d’accès Wifi à Internet, installés spécialement aux visiteurs étrangers pour la Coupe du monde, a permis aux enquêteurs d’intercepter des discussions téléphoniques en VoIP et échanges d’Emails entre MM. Fofana et Roberto de Assis Moreira, frère et agent du célèbre footballeur brésilien Ronaldinho, dans lesquels le frère du joueur de l’Atletico Mineiro demande à son interlocuteur s’il a bien reçu un appel d’amis qui cherchaient des tickets de stades. Ainsi, la collaboration des quatre opérateurs des télécommunications activant dans ce pays avec la police civile brésilienne a montré l’efficacité des technologies de surveillance engagées dans ces enquêtes. Cependant, le journal brésilien n’a pas indiqué si ces conversations ont été interceptées suite à des renseignements fournis par des personnes où à l’utilisation des mots clés pour rechercher et filtrer les communications.
Surveillance de la totalité des terminaux
Les écoutes téléphoniques et électroniques, ont révélé que Fofana a proposé de jouer le rôle d’intermédiaire auprès des dirigeants du Qatar et de Dubaï pour favoriser l’éventuel transfert de Ronaldinho vers un club d’un de ces deux Emirats. L’investigation électronique, baptisée « Opération Jules Rimet », a permis à la police d’arrêter 11 personnes accusées d’avoir revendu illégalement des billets fournis à titre gracieux à des parraineurs, des fédérations, des ONG ou des joueurs. Selon les enquêteurs cités dans l’article du O Dia, la surveillance électronique de ce mondial a fait craquer le système frauduleux qu’a utilisé Fofana pour dérober plus de 1000 entrées par match, avec un prix de base de quelques 1.000 euros l’unité. Pour rappel, ce système a fonctionné durant les quatre dernières Coupes du monde et porterait sur des sommes de 70 millions d’euros par compétition.
Finalement, cette affaire a montré que l’investigation électronique permet de surveiller la totalité des terminaux localisés par les différentes BTS appartenants aux opérateurs brésiliens. Ces derniers ont déployé plus de 250.000 points d’accès supplémentaires pour couvrir la totalité des stades retenus pour cette grande manifestation, les espaces de cérémonies, les centres destinés aux médias, et les centres de gestion des opérations. Selon des observateurs, les experts brésiliens ont exploité le type de l’architecture utilisée dans les réseaux des télécommunications déployés. La segmentation (séparation) des services télécoms facilite l’authentification des utilisateurs qu’ils soient visiteurs, comme Fofana, ou résidents comme De Assis. En clair, le contrôle de l’intégrité des terminaux présents sur le territoire brésilien a permis de révéler la plus grande affaire frauduleuse de l’histoire de la Coupe du monde. Aujourd’hui, cette affaire met en doute l’efficience sécuritaire du système de vente de billets de stade homologué par la FIFA. Dans un communiqué publié la semaine dernière, le directeur du marketing de la FIFA, Thierry Weil, a indiqué que l’organisation « est en attente d’informations détaillées pour déterminer l’origine des billets saisis et, en collaboration avec les autorités locales, (elle) prendra les mesures adéquates ».