Alors que In Salah lutte contre le gaz de schiste depuis une dizaine de jours, le groupe de rap Desert Boys sort le 9 janvier un nouveau clip intitulé « Makach li radi » (Personne n’accepte ça). Mêlant vidéos des manifestations et schémas de fracturation hydraulique, dans une ambiance anxiogène en noir et blanc, la chanson pointe l’opposition des habitants à l’exploitation du gaz de schiste. « Une façon de contribuer, à notre manière, au mouvement anti-schiste », affirme Adel Karane, alias Adoula, le fondateur du groupe, responsable hygiène, sécurité et environnement (HSE) dans une entreprise pétrolière.
Quelle est l’histoire de Desert Boys ?
Adel Karane : Notre groupe Desert Boys est né en 2006. Il se compose de six rappeurs, âgés entre 23 et 26 ans, tous originaires de In Salah. Nous faisons du rap underground et hardcore. En huit ans, nous avons produit une centaine de chansons, regroupées dans cinq albums mis en ligne sur notre blog, et sept clips. Nous créons tous nos clips nous mêmes. On filme les images avec un appareil photo et on enregistre le son avec des micros professionnels, puis je m’occupe du montage. Pour la bande sonore, on ne joue pas d’instruments, on télécharge des rythmes gratuitement sur Internet ou on demande à des amis d’Alger ou d’ailleurs de nous faire des rythmes spéciaux.
De quoi parlent vos chansons ?
Nos textes racontent notre quotidien d’Algériens du désert. Les problèmes rencontrés par les habitants du Sud, les aspirations des jeunes d’In Salah, les qualités des gens du désert, etc. Notre dernier titre « Makach li radi » (Personne n’accepte ça) traite ainsi de l’opposition au gaz de schiste. Le clip « Le pigeon de la paix », sorti en 2013, parle, du désert et du pacifisme légendaire des gens du Sud. Dans un autre clip, « Chkoun ntoma yali hlaktou l’bled » (Qui êtes-vous pour détruire le pays ?), réalisé en 2012, on se montre plus virulent et on s’attaque aux mauvais dirigeants de notre gouvernement qui volent l’argent du pays et privent de leurs droits les citoyens qui veulent vivre en paix.
Dans quelles conditions jouez-vous ?
Nous répétons en général dans la rue, les bois ou de temps de temps chez des amis. Au fil des années, nous avons économisé pour acheter du matériel professionnel. Comme il n’existe aucun magasin de matériel de musique à In Salah, nous nous équipons à Alger, ou nous nous débrouillons avec des amis qui nous apportent ce dont nous avons besoin de France. On ne reçoit aucune aide, financière ou matérielle, de la part de l’Etat. Ni la maison des jeunes, ni la maison de la culture d’In Salah ne nous soutiennent.
Quels sont vos projets ?
Nous travaillons à rendre le rap populaire dans le désert et à changer les mentalités du négativisme vers le positivisme grâce à nos chansons. Nous travaillons aussi à la création d’un studio professionnel qui permettrait aux autres rappeurs de la région, qui ne disposent pas matériel, d’enregistrer leurs chansons et de réaliser leurs clips.