La micro-assurance a connu un important essor ces 5 dernières à travers le monde. En Algérie, cette offre d’assurance, destinée aux populations à faibles revenus, est inexistante en dépit d’un marché à fort potentiel.
«La conception de la micro-assurance en Algérie reste difficile et complexe», explique une étude du ministère de l’Industrie et de la promotion des investissements, menée en partenariat avec le Programme GiZ-dEVEd. Les raisons sont multiples. L’étude cite, notamment, la non-disponibilité des assureurs locaux à offrir des produits de micro-assurance estimant que «le marché des bas revenus n’est pas rentable en raison d’un nombre élevé de transactions à coût élevé et des primes très basses ne supportant pas ces coûts».
Cette réticence des acteurs locaux est justifiée par le fait que les produits d’assurance classique mis sur le marché depuis longtemps peinent à se développer malgré le caractère obligatoire de certains d’entre eux (Cat-Nat notamment), doublée d’une profonde méconnaissance, par les populations, des apports de l’assurance à la protection des divers risques encourus.
Solidarité familiale vs assurance
D’autres facteurs, d’ordre sociologique, viennent aussi se greffer à cette méconnaissance de l’apport de l’assurance d’une manière générale. L’étude cite, entre autres, une forte et large solidarité entre membres de la famille et des croyances religieuses bannissant l’intérêt et le hasard, en constituent des manifestations évidentes.
Pourtant, le potentiel est là. Le marché-cible représente près de 60 % de la population algérienne, particulièrement les petites et moyennes entreprises. Un tissu économique constitué principalement de petites et très petites entreprises, une croissance remarquable de création d’entreprises, ces dernières années (+27%) avec une prédominance de jeunes entrepreneurs et un secteur informel prépondérant dans le secteur de l’emploi et du commerce, préfigure une potentielle demande pour les produits de la micro-assurance.
Un marché pratiquement inexistant
C’est «un marché potentiel très porteur», mais «pratiquement inexploité», note l’étude. Le marché de la micro-assurance en Algérie se caractérise principalement par l’offre de l’assurance-crédit exigée par les banques, entre autres aux jeunes entrepreneurs et entrepreneures, avec toutefois un très faible volume en primes représentant environ 0,01% du chiffre d’affaires global des compagnies d’assurances. « Outre ce produit, il n’existe pas de produit de micro-assurance en cours proprement dit dans le marché algérien », précisent les auteurs de l’étude.
Toutefois, ils prédisent une normalisation de la demande d’assurance/micro-assurance qui «devra devenir, avec le temps, un comportement économique normal résultant d’un réel besoin de protection et de sécurité face aux risques aléatoires de la part des ménages, des professions indépendantes, des entreprises, des investisseurs et de tous les agents économiques de la nation ».
A présent, « tant que ces agents ne sont pas placés dans un environnement juridique, institutionnel, culturel et économique qui leur fera sentir qu’ils sont exposés aux risques à chaque instant de leur vie, ils ne songeront que rarement à contracter volontairement une assurance pour se prémunir des conséquences de leur survenance ». C’est pourquoi, les auteurs de l’étude soulignent la nécessité d’une collaboration entre les différents acteurs du secteur pour le développement de la micro-assurance. Et en premier lieu, les pouvoirs publics. Ces derniers doivent jouer aussi bien le rôle de «promoteur» que celui de «législateur» de la micro-assurance. «Ce rôle peut se jouer, expliquent-ils, à travers des choix macroéconomiques encourageant l’épargne intérieure, la relance des investissements et une réforme fiscale favorable à la création de valeur ajoutée dans l’économie ».
Du temps et de l’accompagnement
Pour Hassan Khelifati, PDG de la Compagnie privée Alliance Assurance, le développement de la micro-assurance en Algérie demande du temps et de l’accompagnement. « C’est un nouveau marché qui n’est pas rentable dans l’immédiat. Il n’est pas rentable en effet d’aller démarcher un client pour un petit montant. C’est pourquoi, il faut l’envisager en inclusif avec les Agences publiques de microcrédit qui doivent jouer le jeu de l’accompagnement des assureurs ».
Khelifati a révélé que sa compagnie avait, à un moment, envisagé d’investir ce créneau avant que les pouvoirs publics ne décident de l’offrir aux seules compagnies publiques. Toutefois, M. Khelifati juge que cette décision est fondée d’autant que les compagnies publiques disposent de plus d’informations sur la clientèle cible, en sus d’un grand réseau d’agences.
Pour lui, il est difficile pour les assureurs, préoccupés par les gros contrats, d’aller vers ce marché en friche, mais qui reste non rentable sans accompagnement.